DÉFENSE : ÉQUIPEMENT DES FORCES

Posté le vendredi 12 décembre 2014
DÉFENSE : ÉQUIPEMENT DES FORCES

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces

armées (1) sur le projet de loi de finances pour 2015, ADOPTÉ PAR

L’ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME VIII

DÉFENSE :

ÉQUIPEMENT DES FORCES

Par MM. Jacques GAUTIER, Xavier PINTAT et Daniel REINER,

Sénateurs.

 

Principales observations

 

1.– Le budget de la défense inscrit dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2015 est prévu à hauteur de 31,4 millions d’euros en crédits de paiement (CP). Selon le projet de loi de programmation des finances publiques (PLPFP) pour les années 2014 à 2019, ce budget serait constant en 2016 et atteindrait 31,5 milliards d’euros en 2017. Les montants ainsi retenus pour la programmation du triennal budgétaire 2015-2017 sont conformes à ceux qu’a fixés la loi de programmation militaire (LPM) du 18 décembre 2013 pour les années 2014 à 2019.

La part des dépenses d’équipement du budget de la défense, au total, doit atteindre en 2015 le niveau de 53,2 % (16,7 milliards d’euros), suivant une trajectoire conforme, là encore, aux orientations de la LPM. En particulier, le programme 146 « Équipement des forces » se trouverait doté, l’année prochaine, de 15,2 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 9,9 milliards d’euros en CP, compte tenu de ressources exceptionnelles (REX) prévues pour 2,1 milliards d’euros – soit 21 % des crédits du programme et 90 % des REX de la mission « Défense » (2,3 milliards).

2. – Le report de charges de cette mission, de la gestion 2014 sur l’exercice 2015, est attendu à hauteur de 3,3 à 3,4 milliards d’euros, dont 60 % (2,1 milliards) concernent le programme 146. Il s’agit d’une légère amélioration par rapport au report de charges, historiquement élevé, constaté fin 2013 pour l’exercice 2014 (3,45 milliards d’euros, dont 2,37 milliards pour le programme 146).

Ce report grèvera d’emblée le budget prévu pour l’année prochaine. Encore son estimation à un niveau a priori contenu repose-t-elle sur deux conditions :

- 1° la levée intégrale de la réserve de précaution portant sur la mission

« Défense » (1,4 milliard d’euros) ;

- 2° le financement interministériel du surcoût des opérations extérieures (OPEX) au-delà de la provision de 450 millions d’euros inscrite en loi de finances initiale

(LFI) pour 2014, assorti d’une contribution du ministère de la défense selon la clé de répartition habituelle (environ 20 % du montant). Le surcoût total de ces OPEX étant estimé à 1,128 milliard d’euros à la fin de l’année, et déduction faite des remboursements attendus d’organisations internationales ou de pays tiers, le surcoût « OPEX » net devrait représenter 624 millions d’euros.

Or l’exposé des motifs du projet de loi de finances rectificative (PLFR) déposé à l’Assemblée nationale indique qu’un décret d’avance à venir procèdera, à ce titre, à l’ouverture de 605 millions d’euros seulement (appelant, en principe, une contribution du ministère de la défense à hauteur de 121 millions d’euros).

Parallèlement, ce même décret d’avance devrait opérer une annulation de crédits, sur la mission « Défense », à hauteur de 572 millions d’euros, au titre de « gage » des ouvertures de crédits programmées en faveur de différentes missions pour la fin d’année (la répartition de l’annulation entre programmes figurera dans le décret).

Cette annonce suscite l’inquiétude de vos rapporteurs pour avis quant au budget de l’équipement des forces, traditionnelle variable d’ajustement budgétaire.

3. – Le montant des REX prévues pour chaque année du budget triennal 2015-2017 serait supérieur de 500 millions d’euros au montant fixé par la LPM 2014-2019, en compensation d’une réduction de 500 millions d’euros de crédits budgétaires introduite par le Gouvernement. Cet accroissement de la part relative des REX dans le budget de la défense se trouve en outre potentiellement accentué, pour l’année prochaine, du fait de l’adoption par l’Assemblée nationale de deux amendements du Gouvernement au PLF 2015 :

- le premier diminue de 100 millions d’euros les crédits du programme 146, au titre de contribution de la mission « Défense » au financement des mesures nouvelles ayant résulté du débat de nos collègues députés sur le PLF ;

- le second augmente à due concurrence les REX attendues, au profit de l’équipement militaire, des cessions de fréquences hertziennes.

Or cette situation fragilise le budget de la défense, dans la mesure où les REX doivent pour l’essentiel provenir d’une cession de la bande de fréquences des 700 MHz dont il est désormais clairement établi – et même admis, serait-ce à demi mot, par le Gouvernement – que les produits ne seront pas disponibles, à tout le moins, en 2015. Pour sécuriser le financement des opérations d’armement (autant que l’article 40 de la Constitution et les règles de la LOLF le permettent), vos rapporteurs pour avis présentent un amendement visant à rétablir les crédits du programme 146 au niveau qui se trouvait inscrit dans le PLF initial.

4. – Afin de permettre la mobilisation des REX désormais programmées au bénéfice de la défense sur la période 2015-2017 (5,5 milliards d’euros au total, selon le PLPFP), le Gouvernement a annoncé son intention de faire usage de la clause de sauvegarde prévue par l’article 3 de la LPM 2014-2019, en recourant à des cessions de participations d’entreprises publiques. Eu égard au choix de ne pas employer directement ces recettes au profit de la mission « Défense », et l’hypothèse ayant été exclue d’un abondement, pour 2015, du programme d’investissements d’avenir (PIA) qui profite à cette mission en 2014, la principale des pistes à présent prospectées conduirait à la mise en place d’une ou de plusieurs sociétés de projet (special purpose vehicles, SPV), capitalisées au moyen, notamment, des produits de cession de participations financières de l’État, en vue que ces sociétés rachètent puis louent, au ministère de la défense, des équipements militaires.

Ce projet, à ce stade, suscite la circonspection de vos rapporteurs pour avis, compte tenu des nombreuses questions qu’il soulève encore, en particulier quant à la date à laquelle le dispositif serait opérationnel, aux équipements qui seraient concernés par ce montage, aux garanties que ces équipements puissent rester parfaitement disponibles pour les armées, et au coût net de l’opération pour l’État.

Mais, sous réserve que les garanties nécessaires soient effectivement aménagées et clairement présentées au Parlement, vos rapporteurs soutiennent, dans son principe, une solution visant à préserver les ressources du budget de la défense conformément à la trajectoire financière déterminée par la LPM.

5. – En supposant que les difficultés budgétaires susmentionnées soient résolues, d’importantes commandes d’équipement militaire devraient intervenir l’année prochaine. Vos rapporteurs pour avis se réjouissent tout particulièrement de celles qui concernent :

- d’une part, 8 avions ravitailleurs MRTT et de nouveaux véhicules pour les forces spéciales, dont les besoins respectifs sont urgents, compte tenu des équipements actuellement en service qu’ils ont vocation à remplacer ;

- d’autre part, un système de drones MALE (moyenne altitude, longue endurance) supplémentaire, dont le premier, actuellement utilisé au Mali et qui doit être compété de son troisième vecteur avant la fin de l’année en cours, a doté nos forces d’une nouvelle capacité opérationnelle décisive ;

- en outre, le système d’information et de combat Scorpion (SICS), programme structurant pour l’armée de terre ; la rénovation de 11 avions de patrouille maritime Atlantique 2 (ATL2) et l’acquisition de bâtiments de soutien et d’assistance hauturiers (BSAH), importants pour la marine nationale ; le lancement de la rénovation à mi-vie des avions Mirage 2000D ; ou encore la première capacité de COMSAT NG (communications par satellite de nouvelle génération) et le lancement de la réalisation du système de renseignement par satellite CERES.

Sont également prévus la rénovation du système de surveillance spatiale GRAVES, le réaménagement de 100 stations de radio MELCHIOR, l’acquisition de radars tactiques terrestres MURIN et, enfin, celle de systèmes de drones tactiques (SDT) pérennes pour l’armée de terre. Pour cette dernière opération, une compétition entre industriels est actuellement pilotée par la direction générale de l’armement (DGA) : cette procédure d’appels d’offres répond au vœu qu’avaient émis vos rapporteurs pour avis, afin de préserver les intérêts financiers de l’État et de fournir à l’armée de terre le matériel répondant au mieux à ses besoins opérationnels.

L’année 2015 devrait également donner lieu à des livraisons particulièrement attendues, notamment celles de 4 avions de transport A 400 M, de la troisième frégate multi-mission (FREMM), des 25 derniers véhicules blindés de combats d’infanterie (VBCI), de 5 hélicoptères Cougar, 8 hélicoptères NH90 et 4 hélicoptères Tigre HAD, outre 11 avions de chasse Rafale.

Sous le bénéfice de ces observations, et sous réserve de l’adoption de l’amendement qu’ils présenteront au nom de la commission, vos rapporteurs pour avis Jacques

Gautier et Xavier Pintat n’émettent pas une appréciation négative et votre rapporteur pour avis Daniel Reiner émet une appréciation positive sur les crédits inscrits dans le PLF 2015 pour le programme 146.

Lors de sa réunion du 26 novembre 2014, votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, ayant examiné l’ensemble des programmes de la mission « Défense », a décidé de donner un avis favorable à l’adoption des crédits de cette mission, tels que rétablis par son amendement, dans le PLF pour 2015, les groupes UMP et UC-UDI s’abstenant.