LIBRE OPINION : Budget/Défense : Bercy travaille à une alternative aux sociétés de projet défense

Posté le mardi 24 février 2015
LIBRE OPINION : Budget/Défense : Bercy travaille à une alternative aux sociétés de projet défense

par Laurent Lagneau Le 23-02-2015 – « Zone Militaire » opex360

« À ce stade, je n’ai pas de plan B. Mon problème est d’avoir les 31,4 milliards d’euros pour mener à bien mes missions, et ce, avant le 1er juillet, pour pouvoir les dépenser », confiait récemment le général Pierre de Villiers, le chef d’état-major des armées, lors d’une audition devant la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale.

En jeu : les 2,3 milliards de recettes exceptionnelles (REX) prévues par la Loi de programmation militaire (LPM) 2014-2019, qui ne seront manifestement pas au rendez-vous pour boucler le budget de la Défense en 2015. Elles devaient être obtenues via la vente aux enchères de fréquences de bande 700 MHZ… Mais pour des raisons réglementaires et vu l’état du marché des télécommunications, cette opération ne pourrait se faire, au mieux, qu’en décembre de cette année… C’est à dire quand il sera trop tard.

D’où l’idée de créer ce que l’on appelle des sociétés de projets, qui dotées de capitaux provenant de la cession de participations que détient l’État dans certaines entreprises, rachèteraient des avions A400M et au moins une frégate multi-missions aux armées pour ensuite les leur louer dans la foulée.

Le projet de loi sur l’activité et la croissance, qui a fait l’objet d’un recours à l’article 49.3 pour franchir l’obstacle de l’Assemblée nationale, comprend des dispositions pour permettre la mise en place de ces sociétés de projet. Les députés les ont d’ailleurs votées, à l’issue d’un débat au cours duquel certains n’ont pas caché leur scepticisme.

Quoi qu’il en soit, si le général de Villiers n’a pas de plan B, le ministère du Budget y travaille. Car ce dernier est hostile à ces sociétés de projet, qui constituent à ses yeux, une dépense « maastrichtienne ».

Au cours de son dernier passage à la commission des Finances de l’Assemblée nationale, le secrétaire d’État au budget, Christian Eckert, a reconnu l’existence de ce plan B, lequel a même été évoqué lors du dernier conseil de défense avant d’y être retoqué. « Quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage », a-t-il lancé à ce sujet, sans donner davantage de précisions sur les dispositions qui y furent proposées.

Les critiques du ministère du Budget au sujet des sociétés de projet sont connues : elles vont engendrer des coûts supplémentaires tout en constituant, donc, une « dépense maastrichitenne », c’est à dire au sens des critères de Maastricht. Dans les colonnes du quotidien Les Échos, l’on peut lire ce commentaire prêté aux services de Michel Sapin : « ce mécanisme a été utilisé par le passé par l’armée grecque pour camoufler de la dette ».

Aussi, selon le journal économique, Bercy veut trouver une réponse plus classique pour trouver les 2,3 milliards d’euros qui risquent de manquer à la Défense, via des « ouvertures de crédits budgétaires » et en misant sur une « accélération de la cession des fréquences ».

« La Défense craint surtout que la cession des fréquences arrive trop tard, mais il n’est pas raisonnable de mettre en place un montage aussi lourd simplement pour se prémunir contre ce risque et gagner quelques mois. S’il s’agit de trésorerie, l’Etat sait faire. Ce montage doit rester une solution de dernier recours. Or il y a d’autres solutions », a-t-on fait valoir, du côté du ministère des Finances, au quotidien.

Pour le CEMA, peu importe le plan pourvu qu’il puisse disposer du budget qui lui a été promis. « Je n’ai pas les compétences pour examiner la question des sociétés de projets, qui est complexe : je fais confiance aux experts et aux autorités politiques. Il me faudra en tout cas les 2,3 milliards d’euros de ressources exceptionnelles. Je suis très confiant et serein compte tenu de ce qu’a décidé le Président de la République », avait-il affirmé devant les députés.

En tout cas, le temps file… Et il y a peu de chances pour que ces 2,3 milliards soient trouvés d’ici l’été. De l’aveu même du ministre de l’Économie, Emmanuel Macron, le projet de loi sur l’activité et la croissance, qui autorise donc les sociétés de projet, ne pourra être mis en œuvre que d’ici le 1er juillet…

Laurent Lagneau

 

 

 

Source : Zone Militaire - opex360