Simon Murray, la Légion et le drapeau de Carlton Garden.

Posté le samedi 16 juillet 2016
Simon Murray, la Légion et le drapeau de Carlton Garden.

C’est à une cérémonie au caractère exceptionnel, tant  par son objet que par son impeccable déroulement, à laquelle l’ASAF, officiellement invitée et représentée par son secrétaire général, a assisté le mercredi 13 juillet dans les jardins du Luxembourg puis à la présidence du Sénat, à Paris.

Il est de tradition qu’à la veille du 14 juillet, la Légion étrangère organise une prise d’armes dans le jardin du Luxembourg au pied du palais où siège la haute assemblée. Cette cérémonie marque de façon très symbolique la fidélité à la République et à ses institutions de soldats d’origine étrangère prêts à mourir pour elles. Ce fut encore le cas cette année où étaient réunis pour l’occasion, à compter de 11 heures du matin,  la musique de la Légion étrangère, un détachement de la 13e demi-brigade de la Légion étrangère (13e DBLE) et les pionniers du 1er Régiment étranger reconnaissables à leur barbe et à leur tablier de cuir. Le tout était commandé par le lieutenant-colonel (au tableau d’avancement) Guillaume Percie de Sert, commandant la 13.

La Légion profite chaque année de cette cérémonie intime pour effectuer ses remises de décorations décernées à l’occasion du 14 juillet. Ainsi, celles-ci ont lieu en famille et ne sont pas noyées dans le flot de toutes celles, très nombreuses, effectuées  le lendemain sur les Champs-Elysées. Notons au passage que, cette année, parmi les décorés se trouvait le lieutenant-colonel Olivier Pinard Legry, neveu de notre président qui reçut la croix de chevalier de la Légion d’honneur. Auparavant, deux légionnaires, l’un d’origine hongroise, l’autre d’origine chinoise, se virent remettre leur décret de naturalisation des mains de monsieur Gérard Larcher, président du Sénat, qui, en outre, leur délivra un message de la part du  président de la République.

Enfin, séquence particulièrement émouvante, avant que le drapeau de la 13e DBLE ne quitte le lieu de la cérémonie, monsieur Hubert Germain, 96 ans, ancien ministre des trois gouvernements Messmer (1970-1972), compagnon de la Libération, ancien de la 13e DBLE où il servit notamment lors de la bataille de Bir-Hakeim, vint, en fauteuil roulant, béret vert sur la tête, au pied de l’emblème puis, aidé par deux légionnaires se leva pour l’embrasser. C’est ce que la Légion appelle des « honneurs muets au drapeau », honneurs qu’elle réserve à ceux qu’elle veut précisément honorer.

Mais un autre événement et pas de moindre importance, restait à venir. Au cours du cocktail qui suivit dans les salons du Sénat, et après une allocution très chaleureuse prononcée par  monsieur Larcher, un ancien légionnaire au destin exceptionnel, Simon Murray, accompagné par madame la baronne de Rothschild, présidente du Groupe Edmond de Rothschild, remit solennellement au général Jean Maurin, commandant la Légion étrangère (COMLE), un drapeau tricolore de 5 m sur 2 m, orné de la prestigieuse croix de Lorraine. Ce drapeau, véritable  morceau d'histoire, est celui de la France libre et arrivait tout droit de Londres, précisément du 4 Carlton Gardens, où il avait été relégué depuis des décennies, dans  la cave de ce qui était le QG du général de Gaulle. Au cours des mots de remerciements, prononcés par le général COMLE, qui suivirent, j’ai cru comprendre à demi-mot que le rapatriement sur le sol français de ce drapeau fut le résultat d’une « manœuvre » montée par Murray qui, je cite le COMLE, s’il fut un légionnaire obéissant et respectueux du règlement ne fut pas toujours un « civil » à l’identique, avec l’aide financière du groupe Edmond de Rothschild. Ce drapeau ira au musée de la Légion étrangère d’Aubagne devenu d’ailleurs musée national.

 


Remise du drapeau de Carlton Garden à la Légion
Source Photo : Le Figaro
A gauche : Simon Murray

 

Simon Murray est né le 25 mars 1940, à Leicester en Angleterre, au sein d'une famille de tradition militaire et très fortunée. Très jeune, il s'embarque comme mécanicien de chauffe sur un vapeur à destination de l'Amérique du Sud puis, le 22 février 1960, il s'engage dans la Légion étrangère et débarque en Algérie pour effectuer son instruction à la 5e compagnie du centre d'instruction n°2 du 1er régiment étranger de Sidi-Bel-Abbès. À l'issue de cette formation, il est affecté à la 3e compagnie du 2e bataillon étranger de parachutistes.

Avec son unité, il participe aux opérations contre le FLN, d'abord dans le Constantinois puis dans l'Oranais. Promu légionnaire de 1re classe le 1er janvier 1961, il est cité et reçoit la  croix de la Valeur militaire. Après le cessez-le-feu, et en application des accords d’Evian, sa compagnie se replie sur la base aérienne 180  de Bou-Sfer à 30 km à l’ouest d’Oran. Nommé caporal le 1er novembre 1962 puis caporal-chef l'année suivante, il quitte la Légion en 1965 après cinq années de service.

Il se lance alors  dans les affaires en intégrant la société Jardine Matheson à Hong Kong qu’il quitte en 1982 pour créer sa propre société Davenham Investments, tout en étant l’agent sur place de plusieurs grands groupes comme Mitsubishi et Total. En 1984, il intègre, en tant que Managing Director, Hutchison Whampoa, conglomérat, à Hong Kong, de distribution, activités portuaires, énergie, et télécom, présidé par le magnat chinois Li Ka-Shing. Il démissionne en septembre 1993 et entre à la Deutsche Bank comme membre du conseil d'administration pour la division Asie-Pacifique et fonde Simon Murray et associés.

Il travaille essentiellement à Hong Kong et en Asie du Sud-est, en étant membre de plusieurs conseils d'administration de sociétés à vocation internationale dont VivendiHermès International et Usinor. Il gère la General Enterprise Management Services Limitedfonds d'investissement spécialement orienté sur la région Asie-Pacifique. Puis, il acquiert son propre fonds d'investissement et devient président de Glencore, un géant mondial du trading de matières premières basé en Suisse.

En 1978, Murray a publié une autobiographie de ses années passées à la Légion, intitulée Légionnaire : un anglais à la Légion étrangère. En 2002, un film a été tiré du livre : Simon : un légionnaire anglais.

Le 28 janvier 2004, à l'âge de 63 ans, il fut l'homme le plus âgé à atteindre le Pôle Sud sans assistance  après un périple de 58 jours durant lequel il perdit 25 kilos, tandis que son épouse,  Jennifer Mather, avec qui il a eu trois enfants, fut la première femme à faire le tour du monde en hélicoptère en solitaire.

                   

                                                                    
Général Gilbert ROBINET
Secrétaire général de l’ASAF.

 

Source : ASAF