ARMEMENT NUCLÉAIRE : La fiabilité des têtes nucléaires françaises.

Posté le vendredi 02 mars 2018
ARMEMENT NUCLÉAIRE : La fiabilité des têtes nucléaires françaises.

M. Charles de La Verpillière (député et membre de la commission de la Défense nationale)


Pouvez-vous (monsieur le directeur du CEA/DAM - Note de la rédaction) nous parler un peu – je ne m’attends pas à ce que vous puissiez nous en dire beaucoup et je comprendrais qu’il vous soit encore plus difficile de répondre précisément par écrit – du durcissement des armes : quels sont les facteurs pouvant influer sur leur efficacité dans l’espace et au moment de leur rentrée dans l’atmosphère, et quelles mesures peut-on prendre ?

 

M. François Geleznikoff (directeur de la direction des applications militaires du CEA

Les performances des têtes nucléaires océaniques sont garanties pour qu’elles atteignent leur objectif sur de longues distances, avec la bonne précision et en franchissant les défenses des pays que la France veut dissuader.
Les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins assurent le lancement des missiles intercontinentaux qui mettent à poste les têtes nucléaires, sur une trajectoire décidée par le président de la République. Cette trajectoire balistique est suivie d’une phase de rentrée atmosphérique jusqu’à l’objectif final.

La tête nucléaire doit faire face, sur cette trajectoire, à un environnement doublement hostile. D’une part, elle subit les ambiances mécaniques et thermiques sévères de l’ensemble des phases successives d’un vol spatial, du lancement au retour dans l’atmosphère. Pour résister à la fois aux températures extrêmes, aux contraintes thermiques et aux pressions externes, la DAM conçoit, avec l’appui d’industriels, des matériaux innovants qui vont constituer l’enveloppe de la tête nucléaire. L’enveloppe résiste ainsi à ces températures extrêmes et maintient la charge nucléaire et les équipements de la tête à une température relativement faible, compatible de leur fonctionnement nominal. La démonstration de cette résistance se fait par des simulations numériques complexes, qui mettent en jeu plusieurs domaines de la physique, et par des validations expérimentales spécifiques.

D’autre part, l’enveloppe de la tête nucléaire est également conçue pour que la tête soit invisible aux radars adverses, mais il faut malgré tout la protéger des agressions que pourraient déployer les défenses adverses. L’intercepteur nucléaire ou Anti Ballistic Missile (ABM) est l’un des plus redoutables systèmes de défense que peut déployer un pays. L’explosion nucléaire de forte énergie de l’ABM va générer, via les rayonnements produits, des contraintes thermomécaniques extrêmes. La démonstration de la tenue de la tête nucléaire aux effets mécaniques d’un ABM ne peut se faire en vraie grandeur : elle est obtenue par une combinaison judicieuse de simulations et d’expériences sur des échantillons et des maquettes. Mais les rayonnements des ABM peuvent avoir aussi des effets destructeurs sur les équipements électroniques embarqués dans la tête nucléaire.

La DAM a conçu et fait développer des composants électroniques capables de résister aux effets des rayons ionisants. La garantie de la fiabilité des équipements électroniques embarqués dans la tête nucléaire est démontrée expérimentalement au sein de différentes installations qui permettent de simuler cet environnement radiatif et de caractériser le comportement sous irradiation des fonctions électroniques. Le développement en France d’une électronique durcie est aussi une retombée industrielle de la dissuasion.

M. François GELEZNIKOFF
Directeur des applications militaires du CEA
Extrait de l’audition par la commission de la défense nationale
et des forces armées de l’Assemblée nationale
Mercredi 24 janvier 2018)

 

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