ARMEMENT : La filière navale militaire attend son porte-avions

Posté le lundi 19 octobre 2020
ARMEMENT : La filière navale militaire attend son porte-avions

Les industriels espèrent que le programme du nouveau bâtiment sera lancé rapidement. 

C’est avec en toile de fond l’annonce espérée du lancement du programme de porte-avions de nouvelle génération (PANG), appelé à succéder au Charles-de-Gaulle à horizon 2038-2040, que s’ouvre, ce lundi, le salon Euronaval. En raison du Covid-19, cette 51e édition se déroule, toute la semaine, dans un format numérique. Florence ­Parly, la ministre des Armées, doit l’inaugurer en adressant un message vidéo à cette filière stratégique de l’industrie d’armement française. Elle regroupe, sous la bannière du Gican, son organisation patronale, 200 entreprises, dont 10 % de grands groupes, 65 % de PME et 15 % d’ETI, sans oublier des dizaines de start-up. La filière emploie directement 48 000 salariés hautement qua­lifiés.

Si elle espère tant le lancement du PANG, c’est que la décision doit être prise rapidement afin de préserver les compétences, notamment de Naval Group, le constructeur des porte-avions français, des frégates, corvettes et sous-marins, des Chantiers de l’Atlantique, spécialiste des grosses coques, et de TechnicAtome, leader de la propulsion nucléaire, tout en apportant de l’activité chez les sous-traitants. L’étude de faisabilité du PANG est toujours en cours d’instruction au plus haut niveau de l’État. La décision de lancer un nouveau porte-avions, qui s’inscrit dans le cadre des plans de relance, relève en effet du président de la République, Emmanuel Macron. « C’est un projet emblématique pour la technologie française et notre écosys­tème, qui entraînerait une coopération avec les États-Unis dans les catapultes. Son lancement serait le bienvenu », souligne Hervé Guillou, président du Gican.

Certes, la construction navale militaire n’est pas aussi ébranlée par les conséquences de la crise sanitaire que l’aéronautique ou les industries du tourisme. Les chantiers tournent quasiment à plein régime afin d’honorer leur carnet de commandes et répondre aux attentes de la Marine nationale et des clients à l’international. Pour l’heure, « aucun programme n’a été annulé, aucune révision capacitaire n’est intervenue, dans un monde toujours aussi instable et incertain », souligne Pierre Éric Pommellet, PDG de Naval Group. Ce dernier s’appuie sur ses bases industrielles internationales en Inde, au Brésil, en Australie, en Égypte et participe à des campagnes en Roumanie (corvettes), aux Pays-Bas et en Grèce.

En France, « le gouvernement a tenu ses engagements en confirmant, en 2021, la hausse du budget de la défense, prévue dans le cadre de la loi de programmation mili­taire (LPM). Des commandes et des livraisons ont été confirmées, ce qui donne de la visibilité aux industriels mais aussi à la jeunesse, qui peut se tourner vers nos métiers qui restent porteurs », poursuit Pierre Éric Pommellet.


Consolidation européenne 

Pour autant, « la résilience de notre industrie est en trompe-l’œil, avertit Hervé Guillou, président du ­Gican. La crise du Covid a mis un coup d’arrêt brutal aux contacts commerciaux à l’international. Il existe un risque avéré de décalage de commandes, y compris sur le marché commercial (paquebots de croisières, NDLR) ». Même maintenue, la commande nationale ne suffit pas à assurer le plan de charge des chantiers. D’où un appel à l’État afin qu’il avance certains contrats avec trois priorités : le PANG, le sous-marin lanceur d’engins nucléaires (SNLE) de troisième génération et les frégates de défense et d’intervention (FDI).

La filière, « qui est une industrie de temps long », redoute « une crise contracyclique dans quelques années en raison des contrats perdus ou gelés pendant six à dix-huit mois, selon les pays, à cause de la crise sanitaire, qui déboucheront sur un trou de charge important », insiste le Gican. Or investir dans le naval militaire est pour l’État « un levier de relance quasi immédiat : 1 million d’euros investis génère 2 millions de PIB en plus dans les deux ans et 600 000 euros de taxes ainsi que 17 emplois induits », précise Hervé Guillou.

Dans ce contexte, le Gican appelle, une nouvelle fois, les Européens à unir leurs forces et à éviter les guerres fratricides. « En 2005, l’Europe était la seule à exporter. En 2020, la Chine est devenue le premier exportateur mondial en volume avec un seul chantier géant devant la Russie, qui a réuni ses chantiers, et l’Europe, qui en compte 12, là où les États-Unis n’en comptent que deux », développe Hervé Guillou, pour qui la crise offre « plutôt une opportunité pour accélérer les discussions ». Bien qu’elle montre une tendance au recentrage de chaque État autour de sa souveraineté nationale et la défense de ses emplois. Reste que, comme le souligne Pierre Éric Pommellet, « la coopération mise en place par la France et l’Italie via Naviris, la joint-venture formée par Naval Group et Fincantieri, est un vecteur de coopérations et de projets européens ».

 


Véronique Guillermard
Le Figaro

Rediffusé sur le site de l'ASAF :www.asafrance.fr
Retour à la page actualité

 

Source : www.asafrance.fr