COMMEMORATION : «Ce 8 mai est un hommage à tous les soldats inconnus»

Posté le vendredi 08 mai 2020
COMMEMORATION : «Ce 8 mai est un hommage à tous les soldats inconnus»

En ce 8 mai 2020, la seule cérémonie officielle, à l’échelle nationale, sera l’hommage rendu par le président de la République au Soldat Inconnu, dont la dépouille repose depuis bientôt un siècle au pied de l’Arc de Triomphe. C’est le 11 novembre 1920, deux ans après l’armistice, que la Chambre décida à l’unanimité d’y enterrer un Poilu de la Grande Guerre, mort sur le front et dont nul ne connaissait ni le nom ni le jour de la mort, ni même le nom du champ de bataille où son corps fut retrouvé.

Ce soldat présente pourtant certaines qualités qui ont guidé le choix fait à l’époque par le haut commandement. En premier lieu, il servait dans l’armée française ; c’est à ce titre qu’il est mort, à l’instar de ce qu’avait écrit Péguy quelques années plus tôt, ignorant à l’époque que ce poème le concernerait dès septembre 14 :

« Heureux ceux qui sont morts pour la terre charnelle, mais pourvu que ce fut dans une juste guerre ».

Au sein des forces armées, il faisait partie des « petits » et se situait au bas de la hiérarchie ; nul ne sait s’il était un petit gradé ou simplement un soldat de 2e classe ! Peu importe qu’il fût, ou non, un « homme de troupe », il était tout simplement un « homme de la troupe ». Car, ayant trouvé la mort en première ligne, il appartenait à l’un de ces nombreux régiments d’infanterie qui ont monté la garde durant quatre années, ont su résister pied à pied par tous les temps, et monter à l’assaut quand l’ordre en était donné, jusqu’au jour où la mort est venue le frapper.

La France rendra aussi hommage à ceux qui ont sacrifié leur vie dans les guerres qui ont suivi et dans les opérations extérieures, à l’instar du légionnaire Kévin Clément mort au combat au Mali le 4 mai.

Enfin, il est décédé sur l’un des principaux champs de bataille de cette guerre, c’est dire qu’il est allé au bout de son engagement, à l’instar des quelque 1 400 000 compagnons d’armes morts au front. Quelle que fût leur origine, qu’ils fussent célèbres, comme Psichari, Alain-Fournier ou Driant, ou de simples Français venus de leur province lointaine, tous, ils se sont engagés, corps et biens et en première ligne, pour participer à la défense du pays, de son territoire et de sa population.

En ce 8 mai, la France rendra ainsi hommage à ce soldat inconnu et inhumé depuis un siècle au pied de l’Arche immense ; à travers lui et comme toujours, elle rendra également hommage à tous les soldats qui sont morts au cours de la Première Guerre mondiale, comme à ceux qui ont sacrifié leur vie dans les guerres qui ont suivi et dans les opérations extérieures, à l’instar du légionnaire Kévin Clément du 1er régiment étranger de cavalerie, mort au combat au Mali, lundi 4 mai.

Mais ce 8 mai sera particulier, car il sera vécu par l’ensemble de la Nation dans le confinement ; il sera ainsi l’occasion de rendre hommage à tous ceux qui se sont engagés dans une autre lutte, non pas contre un ennemi extérieur à nos frontières et bien défini, mais contre la pandémie de Covid-19. Il sera l’occasion de rendre hommage plus particulièrement à tous les «humbles», ayant des qualités identiques à celles du soldat inconnu, et qui, sans bruit, sans arrêt et sans souci du repos, ont travaillé et continuent d’œuvrer pour défendre les Français.

Il s’agit d’abord et surtout de tous les personnels du monde médical, quelle que soit leur fonction, médecins, infirmières ou aides-soignantes: leurs masques ont remplacé les casques d’antan et les stéthoscopes les fusils. Certains d’entre eux ont tout donné, puisqu’ils ont sacrifié leur propre vie, morts à la tâche et victimes eux-mêmes de la pandémie. Par leur dévouement sans limite et par leur engagement total, ils ont combattu un autre mal, plus sournois, mais tout aussi dangereux. Pour la plupart ils resteront «inconnus», mais par leur action, ils auront protégé la nation et auront permis au pays de triompher de ce virus.

La Flamme qui sera ravivée portera bien son nom de « Flamme d’espérance » !

Parmi les «petits» ou les «sans grade» figurent aussi tous ceux qui œuvrent au quotidien, bien souvent dans l’indifférence générale, car leur tâche peut paraître ingrate, peu valorisante, répétitive, ou tellement naturelle que l’on oublie ces hommes et ces femmes qui travaillent dans l’ombre pour permettre aux autres de vivre correctement en sécurité. Ce sont le monde de l’agriculture et de l’alimentation, les petits commerçants, comme les agents de propreté, les chauffeurs et les livreurs, et sans oublier les policiers, gendarmes et militaires, qui poursuivent sans relâche leur mission. Pour une fois, ils seront mis à l’honneur.

Et enfin, puisque la cérémonie aura lieu à l’Arc de Triomphe, nous honorerons ceux qui depuis près d’un siècle veillent sur la Flamme en la ravivant chaque soir. Ce 8 mai 2020, comme les autres soirs de l’année, ce geste simple dépassera alors le simple symbole, car la Flamme qui sera ravivée portera bien son nom de la «Flamme de l’Espérance»!

Bruno DARY
Figaro
Général d’armée (2s)
Président du Comité de la flamme sous l’Arc de triomphe

Rediffusé sur le site de l'ASAF : www.asafrance.fr.

Source : www.asafrance.fr