CONFLIT : La paix n’est pas l’absence de guerre

Posté le mardi 20 octobre 2020
CONFLIT : La paix n’est pas l’absence de guerre

« Aucune civilisation ne cède à une agression si elle n’a pas d’abord développé un mal qui la rongeait de l’intérieur. » aurait déclaré Polybe, général, homme d'État, historien et théoricien politique grec (150 ans avant J.-C.). Plus près de nous Victor Hugo, après la révolution de février 1848 qui met fin à la monarchie, a su discourir devant l’Assemblée nationale avec lucidité :  « C’est à la faveur de l’ignorance que certaines doctrines fatales passent de l’esprit impitoyable des théoriciens dans le cerveau des multitudes ». Il ajouta fermement que « Dans la situation politique telle qu’elle est, deux républiques sont possibles, l’une abattra le drapeau tricolore sous un autre, jettera à bas la statue de Napoléon et ajoutera à l’auguste devise : Liberté, Égalité, Fraternité, l’option sinistre : ou la mort ! […] De ces deux républiques celle-ci s’appelle la civilisation, celle-là s’appelle la terreur. », une phrase tristement d’actualité.

En février 2020, dans un jardin public de Paris, a été inaugurée une plaque portant le nom du colonel Arnaud Beltrame, mort lors d’une attaque terroriste à Trèbes dans l’Aude. On peut y lire qu’il a été assassiné « victime de son héroïsme ». C’est un terrible contresens car cet officier est mort en héros comme ceux qui, dans l’Antiquité, étaient donnés en exemple à leurs concitoyens pour avoir agit en fédérateurs de la vie commune. Aujourd’hui beaucoup de Français, notamment les plus jeunes, courent le risque de se faire piller l’âme lorsqu’ils suivent des idéaux et des modes de vie qui répondent seulement à des désirs et à des besoins matériels, à l’individualisme exacerbé par les réseaux sociaux où chacun exprime, sans fin et sans frein, son opinion comme étant la vérité. L’idée de défendre la France est surpassée par celle, individualiste, de protéger ses biens personnels et la civilisation consumériste. Certes, chacun veut vivre en sécurité, mais avec la protection des autres. A-t-on à peine un regard de reconnaissance pour les militaires de la force Sentinelle qui, arpentant inlassablement les rues, nous protègent quotidiennement ? Tout ceci est le signe que le principe de précaution est devenu plus fort que la peur du risque et on le mesure pleinement, aussi, avec la présente crise sanitaire.

À cet égard, une société, qui partage la même histoire ou le même destin et l’amour des siens, a le devoir de se défendre. La guerre est partie de la nature humaine. C’est pourquoi il est urgent de la dominer sinon elle nous domine. À l’évidence, depuis la fin de la Guerre froide, il y a maintenant trente ans, les conflits se sont multipliés. Actuellement ils se déroulent au Yémen, en Syrie, en Libye, au Haut-Karabakh, au Mali et dans tout le Sahel.  Tandis qu’en Europe nous avons désarmé, d’autres réarment, telles la Chine, la Russie, l’Inde, l’Arabie saoudite… Les importations d’armements dans les pays du Moyen-Orient ont progressé de 61 % sur la période, représentant 35 % du total des importations mondiales d'armes au cours des cinq dernières années. L’Asie et l'Océanie ont conservé leur place de premières régions importatrices d'armes sur la période 2015-2019, enregistrant ensemble 41 % des importations mondiales d'armements conventionnels en volume.

Certes, on nous opposera que désormais il s’agit de conflits à bas bruit, basse intensité ou asymétrique. Certes, la France a des armes et des forces armées pour défendre ses intérêts vitaux sur son sol ou à la source, comme au Sahel depuis 2013. Pour autant, il s’agit d’une armée professionnelle qui s’instruit pour vaincre mais dont nombre de citoyens ne se soucient que lors de l’annonce de la mort tragique au combat d’un soldat et pendant le bref temps nécessaire à l’hommage national aux Invalides. La réalité de l’adversaire immédiat est cependant une menace pour chaque Français : professeur, prêtre, journaliste et tant d’autres comme au Bataclan ou à Nice. L’adversaire est bien « une organisation terroriste, internationale, constituée de groupes terroristes qui ont fait allégeance à al-Qaïda et dont l'objectif contrevient directement à la sécurité des Français, à l'étranger et sur le territoire national. » selon le général Lecointre, chef d’état major des Armées, au Sénat le 14 octobre 2020. L’armée française ne doit pas se retrouver un jour en position de céder devant une pression de cette nature. « Si vis pacem para bellum. »

Ni renoncement, ni abandon, ni trahison ! En effet, chaque nation a droit de se doter d’un corps de règles qui lui est propre afin de veiller à sa sécurité nationale, dans le respect du droit international. En 2020, dans la société française il reste deux mots, qui, pour certains, sonnent comme celui d’une impuissance à se projeter dans l’avenir, « vivre ensemble », alors que d’autres brandissent sourdement le « séparatisme ».

« La guerre n'est pas toujours pour un État un aussi grand mal qu'on le pense. Il est des circonstances où elle est le seul remède contre les factions qui le déchirent, surtout lorsque le fanatisme les met aux mains. » (Philippe-Auguste. de Sainte-Foy Arcq - Loisirs, ou pensées diverses - 1755).

Dominique BAUDRY 
Colonel (er),
membre de l’ASAF


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