Coopération et exportation d’armement

Posté le mardi 30 juillet 2019
Coopération et exportation d’armement

Extrait de l’audition devant la Commission de la Défense
de monsieur Joël BARRE
délégué général pour l’armement
Le 2 juillet 2019

 



1- Questions des membres de la Commission

(…)

Mme Natalia Pouzyreff (députée)

Monsieur le délégué général, vous nous avez rappelé la liste des programmes menés en coopération. Les grands programmes qui ont été lancés au cours des dernières années l’ont été le plus souvent en coopération, afin de partager les coûts de développement, d’augmenter la production et de mutualiser certains coûts logistiques. Mon propos n’est pas de remettre en cause ces principes et le bien-fondé de la coopération, mais il se trouve que ces programmes sont exposés, s’agissant des licences d’exportation, à la décision de nos partenaires et à d’éventuels changements de ligne politique.
C’est ce qui est arrivé en Allemagne, tandis qu’au Royaume-Uni, une organisation non gouvernementale a mené une action en justice pour empêcher des exportations d’armes réalisées en coopération.

Comment comptez-vous, à l’avenir, sécuriser ces programmes structurants ? Il paraît nécessaire d’édicter des principes clairs et solides, soit en renforçant le bilatéral, soit en envisageant de s’affranchir d’une régulation au niveau européen.


M. André Chassaigne (député)
 Il m’est difficile, dans la mesure où je m’exprime toujours en dernier, de trouver des questions qui n’ont pas encore été posées…

Monsieur le délégué général, j’aimerais revenir sur une interview que vous avez donnée au journal Les Échos en mars 2019. Parmi les multiples questions qui vous ont été posées, j’en ai retenu une, sur laquelle j’aimerais revenir. Elle concerne le gel allemand sur les exportations de matériel de défense, en particulier en direction de l’Arabie saoudite. Vous avez répondu : « À l’échelon européen, je souhaite que nous nous mettions d’accord sur les règles d’exportation des matériels développés en commun, notamment entre la France et l’Allemagne. Les accords Debré-Schmidt, qui permettent à chacun d’exporter selon sa réglementation nationale, sont une excellente source d’inspiration et doivent être actualisés. » Et vous avez ajouté : « À l’heure où nous développons des programmes ambitieux en coopération franco-allemande, notamment pour le système de combat aérien du futur et le char du futur, il est urgent de trouver des règles du jeu communes. »

J’aimerais savoir s’il y a eu, avec l’Allemagne, des évolutions concernant les exportations ? Je pense tout particulièrement aux exportations d’armes en direction de l’Arabie saoudite, auxquelles le Bundestag s’est opposé.

 

2- Réponse de M. Joël Barre (DGA)

Votre question rejoint celle de Mme Natalia Pouzyreff.

 Je pense effectivement que nous ne pouvons pas coopérer à l’échelle européenne, comme nous essayons notamment de le faire avec les Allemands et les Britanniques, sans nous mettre d’accord, suffisamment tôt dans le développement de ces programmes, sur les règles d’exportation que nous allons adopter de manière commune. Je ne pense pas que cela puisse ou doive se faire à l’échelle européenne, car il serait très difficile d’arriver à un consensus entre les différents États. Par ailleurs, je suppose que cela impliquerait un nivellement des règles par le bas.

Je ne pense pas que la France, qui a exporté pour un peu plus de 9 milliards d’euros en 2018, dont 25 % en Europe – une proportion qui ne dépassait pas 10 % il y a quelque temps encore – ait intérêt à ce que la question de l’exportabilité soit gérée à 27 ou à 27+1. Nous avons tout intérêt à ce que la règle du jeu soit clairement établie, en particulier avec les Allemands, puisque c’est avec eux que nous travaillons sur les grands programmes en cours. Nous pourrons ainsi nous lancer dans des développements et des réalisations en commun, avec des règles du jeu claires.

Vous me demandez si ces règles sont claires à l’heure actuelle.
Des discussions sont en cours au plus haut niveau politique entre nos deux pays, qui font suite au traité d’Aix-la-Chapelle. J’espère qu’elles vont déboucher sur un accord avec nos amis allemands et que nous pourrons intégrer ces règles, une fois qu’elles auront été définies, dans les accords de coopération de réalisation de nos grands programmes.
S’agissant de l’avion de combat du futur et du char de combat du futur, il n’y a pas d’urgence, puisque nous ne fournirons ces matériels qu’à l’horizon 2040. Il faut néanmoins que ces règles du jeu soient clairement établies lorsque nous lancerons définitivement le développement, puis la réalisation, de ces projets. Il faut y arriver, et j’espère bien que nous y arriverons.
La DGA apporte évidemment son expertise technique mais il y a, comme chacun sait, une forte dimension politique dans ces discussions, qui sont menées par la Présidence de la République et le Gouvernement.

 

Pour lire l'audition de monsieur Joël BARRE, délégué général pour l’armement, devant la Commission de la Défense dans son intégralité, cliquez sur le PDF ci-dessous.
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