ELECTIONS PRÉSIDENTIELLES : Les engagements de Marine Le Pen pour l'aéronautique civile et militaire.

Posté le mercredi 26 avril 2017
ELECTIONS PRÉSIDENTIELLES : Les engagements de Marine Le Pen  pour l'aéronautique civile et militaire.

Découvrez dans leur intégralité les réponses de Jérôme Riviere - Ancien député - Avocat conseil - Conseiller Défense de Marine Le Pen au questionnaire très précis d'Air & Cosmos.

 

1) Marine Le Pen s'engage à porter le budget de la défense à 2% du PIB dès le début du quinquennat avec l'objectif de 3 % en 2022. Comment sera financée cette accélération ?

Un mot d'abord sur la situation actuelle, si les armées sont au bord du déclassement, dans un état d'épuisement et de paupérisation avancés que tout le monde reconnaît enfin, c'est en raison justement de la politique menée par des candidats soi-disant raisonnables et sérieux en matière de gestion des finances publiques, à savoir François Fillon, Premier Ministre de 2007 à 2012 et Emmanuel Macron, ministre des Finances de 2014 à 2016. Il faut cesser, comme le font de trop nombreux commentateurs, d’affirmer que seuls leurs programmes sont raisonnables et finançables. Bien au contraire, ces programmes qui reproduisent les politiques menées depuis plus de dix ans, ont mené à la précarité actuelle de notre système de défense, tant sur les plans opérationnels et humains que matériels et industriels. Je note d'ailleurs que leurs propres conseillers ne disent pas autre chose, l'effort qu'ils recommandent est bien supérieur à celui affiché par leurs candidats. Les spécialistes qui entourent François Fillon, par exemple, lui ont conseillé 2% dès 2020, mais comme lorsqu’il était à Matignon, il ne les écoute pas.

Un réarmement massif sur le plan financier et brutal en termes de calendrier, s'impose pour éviter l'effondrement.

Comment le financer ? D'abord par des crédits budgétaires bien réels ! MM. Fillon et Macron ont sans cesse eu recours à des ressources mercenaires (fréquences hertziennes, ventes à l'encan de notre patrimoine culturel, etc.), ressources mercenaires qui ont rarement été au rendez-vous. Leur inclusion dans l'effort de défense national est une politique malhonnête vis -à-vis des militaires qui, eux, risquent leur vie. Ces véritables crédits doivent être dégagés à hauteur suffisante (2% en 2018 puis par palier, 3% en 2022) par une redéfinition des priorités de l'État, arrêt des gabegies et suppression des innombrables observatoires, missions qui vampirisent le budget de l'État régalien et de l'État stratège. Les économies ainsi dégagées iront en priorité aux armées. Enfin, l’important pour un budget, c’est sa bonne exécution. Pour éviter qu’une fois encore le budget du ministère de la Défense Nationale serve de variable d’ajustement, Marine Le Pen a clairement indiqué qu'elle assortissait cet effort d’une importante garantie : la modification de la Constitution afin que l'effort de défense soit constitutionnellement hors de portée de toute régulation budgétaire. Ainsi sera mis fin à deux tares congénitales des LPM : leur sous-financement initial et leur non-exécution.

En disant cela, Marine Le Pen ne fait qu'inscrire son programme de redressement dans le mouvement général qui a saisi non seulement l'Europe, mais aussi la Chine, les États-Unis et la Russie. Réarmer ou être déclassé, telle est l'alternative qui s'offre aux candidats. Nous avons choisi le redressement par le réarmement.


2) Quels seront les principaux axes d'effort dans le domaine capacitaire, en particulier dans le domaine aérien ?

La première capacité est "d’être et durer". Il faut que nos armées se densifient pour durer sur un ou plusieurs théâtres d'opérations. Or, aujourd'hui, les armées ont dépassé de 30% leurs contrats opérationnels avec des moyens (VAB, avions de transport) en forte chute. Notre effort portera donc en priorité sur l'augmentation des effectifs de 50 000 hommes pour les armées afin de regagner en potentiel ce que MM. Fillon et Macron ont gratté jusqu'à l'os. Ce sera aux États-majors de proposer les affectations de ces recrutements, mais nous serons vigilants sur les micro-populations (commandos de l'air, en nombre insuffisant ; mécaniciens, etc.) qui sont la richesse de nos armées.

Ensuite, nous attachons beaucoup d'importance à la composante aéroportée de la dissuasion. Son renouvellement doit être l'occasion d'explorer de nouvelles frontières technologiques tant pour l'avion de combat Rafale que pour les équipements et l'armement associé. Cet effort de R&T qui permettra de consolider nos capacités dans des domaines-clés comme la furtivité et l'hyper-vélocité, est indispensable, c'est pourquoi Marine Le Pen prévoit de doubler le budget de la recherche.

En outre, la France doit continuer à disposer des capacités-clés qui font d'elle une puissance militaire indépendante et efficace. La première d'entre elles est la capacité à disposer de moyens de renseignement indépendants. Je pense au trio classique qui combine forces spéciales (ce qui suppose leur mobilité et notamment le ravitaillement des hélicoptères), satellites (avec la poursuite des programmes existants de remplacement des générations actuelles), et drones (accélération du programme de drone en coopération européenne).

Deuxième capacité, la frappe dans la profondeur des dispositifs ennemis durcis tout en disposant de la supériorité aérienne. Nous sommes favorables à la reprise des commandes de Rafale (Tranches 4 et 5), à l'évolution de l'avion d'armes (standard F4 et études d'un Rafale lourd). Nous sommes aussi partisans de l'exécution sans retard de la feuille de route missiles avec le Royaume-Uni et de la poursuite de l'effort national dans ce secteur (MICA NG, notamment). La projection des troupes, troisième capacité, est insatisfaisante. Le programme A400M est le symbole des ratés de la coopération européenne, faute d'une bonne conduite des programmes. Ces ratées obligent aujourd’hui l'armée de l'Air à commander des C-130J. Je rappelle que le programme TRANSALL avait été une réussite, sans fusion industrielle, grâce à une harmonisation poussée des besoins des armées de l'Air allemande et française. Je note aussi, que même avec l'A400M, les besoins en transport stratégique ne seront pas totalement remplis. Il nous faut trouver des solutions durables et pérennes avec la Russie sur ce segment-clé plutôt que de louer des Antonov 124 à des sociétés douteuses au travers d’intermédiaires suspects. Je propose de les acheter directement à la Russie en s’entourant des garanties techniques et d'après-vente que la DGA devra négocier.

Enfin, la protection de nos troupes projetées imposera de revoir les blindages des aéronefs, leur autoprotection et la bulle procurée par la défense sol-air multicouches, du Mistral à l'Aster Block 1 NT.


3) Les armées françaises sont actuellement très accaparées par les opérations, bien au-delà des scénarios envisagés par le Livre Blanc. Ce rythme d'opération peut-il être conservé ?

La réponse est clairement non, moins en raison du dépassement des contrats opérationnels prévus par les livres blancs, qu'en raison d'un changement de politique étrangère. L'armée française n'a pas vocation à être le gendarme d'une Europe qui n'assume sa sécurité que par procuration française en Afrique et américaine sur le continent. Elle n'a pas davantage vocation à être le supplétif des États-Unis comme le fut -  et pour son malheur -, l'armée britannique en Irak et en Afghanistan. Elle a pour mission première de défendre la France, c'est-à-dire tous ses territoires, ses approches maritimes, et sa ZEE. Nous en sommes loin ! Cette priorité affichée donnera lieu à une planification spécifique dans la future LPM pour restaurer nos capacités en France de logement, de patrouille des approches maritimes, d'entraînement et d'équipement de base. Concernant les opérations extérieures, qui seront décidées en fonction de critères précis (intérêt national, stratégie de sortie politique, tissu d'alliances), il faudra veiller à ce que l'armée soit déployée avec des moyens solides : véhicules protégés (60% ne le sont pas aujourd’hui), ouverture des voies, stock de munitions, etc.


4) La France doit-elle lancer un programme de construction d'un nouveau porte-avions ? Peut-on espérer, à terme, opérer deux bâtiments de ce type ?

La réponse est un double oui. Il est nécessaire de disposer au plus tôt, de deux porte-avions, pour assurer la permanence opérationnelle et permettre l’entrainement des pilotes de façon continue. Marine Le Pen l’a indiqué, les études et la construction d’un porte-avions nucléaire ayant les capacités du Charles de Gaulle seront lancées dès 2017 pour permettre sa mise en service avant le prochain arrêt long de ce dernier, rétablissant ainsi au plus tôt la permanence. La construction d’un deuxième exemplaire sera lancée à temps pour assurer le remplacement du Charles de Gaulle dès son retrait du service actif c’est à dire à l’horizon 2037 / 2040.

Les propositions d’Emmanuel Macron de « faire étudier un porte-avions pendant le quinquennat à venir » ou de François Fillon, qui n’aborde pas le sujet, sont de facto un renoncement au principe de la permanence et amènent à poursuivre dans la voie du déclassement de la France.


5) Quels sont les engagements de Marine Le Pen concernant le lancement de la cinquième tranche de production de l'avion de combat Dassault Rafale ?

Le programme Rafale est un programme de souveraineté. Tout sera donc mis en œuvre pour qu'il se poursuive, non seulement à travers les commandes des T4 et T5, mais aussi par les évolutions technologiques que cet appareil permet. Le Rafale est au début de son âge adulte, il dispose d’un énorme potentiel devant lui.


6) La filière française de l'aérospatiale et de défense juge vital le maintien du budget de 1 Md€ que consacre chaque année le ministère de la Défense à la R&T. Quels sont les engagements de Marine Le Pen sur ce sujet ?

Le programme Défense de Marine Le Pen prévoit un doublement de cet effort de R&T, soit 1,5 milliard €. Outre les très nombreuses études qu'il faut lancer (dissuasion, feuilles de route spatiale, aviation de combat, missile, radar, etc.) et les démonstrateurs à développer (nEURon, drone male, etc.), il faut créer de la rupture technologique et pour cela investir massivement dans l'avenir. Chaque centime de R&T est un investissement de souveraineté.


7) Depuis 2010, le budget consacré à la recherche aéronautique civile a été divisé par trois. Marine Le Pen s'engage-t-elle à inverser cette tendance ? Si oui, dans quelles proportions ?

La situation est paradoxale. En effet si le secteur commercial se porte bien, au-delà de cette simple photo instantanée, nous nous inquiétons de deux ruptures dangereuses. La première caractérisée par les efforts, en hausse, du secteur privé face, à ceux, en baisse, du secteur public (DGAC, PIA, etc.). La seconde se traduit par la hausse de la R&T de l’aéronautique civile en Europe (Allemagne, Royaume-Uni) et la baisse de la nôtre. À ce rythme-là, la France court là aussi, le risque d'un déclassement sur l'un des rares segments industriels de pointe non délocalisables et fortement exportateurs. L'ambition nationale exige de relever le budget de R&T civile des 50 millions € où il se traîne pour le porter à 200 millions €. Quand on voit le coût gigantesque de l'éolien en France, méthode subventionnée, inutile, qui a prouvé son inefficacité en termes de production d’énergie et qui occasionnera, on le sait avec certitude aujourd’hui, des dégâts considérables en particulier sur les fonds marins, je considère que l'on doit cesser de financer ce type de recherche et injecter davantage vers des secteurs qui proposent une ambition nationale.


8) Les PME de la filière aérospatiale et de défense sont très satisfaites du dispositif Crédit Impôt Recherche. Marine Le Pen s'engage-t-elle à maintenir et à améliorer ce dispositif ?

Marine Le Pen prévoit de maintenir le dispositif du Crédit Impôt Recherche qui existe actuellement, à la différence près qu'il sera plutôt orienté vers les TPE-PME. Nous souhaitons aussi diriger une part de l’assurance-vie (environ 2%) vers le capital-risque et les startups, et inciter les grands groupes, y compris ceux de l’industrie de défense, à créer leur propre fonds dans les entreprises innovantes.

Jérôme RIVIERE
Ancien député - Avocat conseil -
Conseiller Défense de Marine Le Pen

  

Source : Air et Cosmos