EUROPE. Armée européenne : Paris veut désamorcer les polémiques

Posté le lundi 04 février 2019
EUROPE. Armée européenne : Paris veut désamorcer les polémiques

«La création d’une armée européenne, projet honni par l’administration américaine et redouté par l’Otan, prendra un certain temps pour se concrétiser, mais montre la détermination des Européens à assurer leur sécurité», a déclaré hier Florence Parly, la ministre française de la Défense.

«L’expression armée européenne est une image utilisée par le président Macron pour mieux faire comprendre ce que l’Union européenne fait pour sa défense», a-t-elle expliqué lors d’un entretien à Bucarest. L’enjeu est important à quatre mois des élections européennes dont la sécurité sera l’un des thèmes.

«CSP (Coopération structurée permanente), Fonds de défense, personne ne comprend. Parler d’armée permet de faire comprendre que l’UE veut être en mesure d’assurer sa propre sécurité», a-t-elle souligné. Le président Emmanuel Macron et la chancelière Angela Merkel ont relancé le projet lors de la signature du traité d’amitié franco-allemand à Aix-la Chapelle fin janvier.

Et le chef du gouvernement espagnol Pedro Sanchez a manifesté son adhésion au projet lors de son intervention sur l’avenir de l’Europe devant le Parlement européen. Le président américain s’est à plusieurs reprises insurgé contre ce projet et le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg, relaye les préoccupations de l’Alliance.

Mise en garde de l’Otan

«Il est hors de question que l’UE se substitue à l’Otan. Elle doit être complémentaire, pas concurrente», a-t-il lancé mercredi soir à son arrivée à Bucarest où il était l’invité de la réunion informelle des ministres de la Défense de l’UE. M. Stoltenberg était à Washington quelques jours plus tôt. «L’Otan reste la pierre angulaire de la défense collective.

Tout ce que nous faisons dans l’UE, nous le faisons en complément, pas en concurrence avec l’Otan», a répondu Mme Parly. «Mais il y a des débats sur les modalités», a-t-elle souligné. «On ne peut pas exiger de l’UE qu’elle augmente ses contributions pour sa défense et s’offusquer du fait que les Européens s’organisent pour le faire», a-t-elle rétorqué.

«Si le message est payez plus pour acheter américain, alors certains Européens ne seront pas nécessairement d’accord avec cette ligne», a-t-elle averti. L’Union européenne progresse dans le cadre de sa coopération structurée, un des sujets des entretiens de Bucarest. «17 nouveaux projets ont été lancés dont certains très importants, comme la modernisation de l’hélicoptère d’attaque franco-allemand Tigre», a rappelé Mme Parly. L’UE s’est également dotée d’un Fonds européen de défense.

Sa dotation devrait passer de 500 millions à 13 milliards d’euros pour la période 2021-2027. L’argent doit permettre de financer des projets transfrontaliers interopérables en équipements et en technologies. Dix Etats membres se sont par ailleurs engagés dans une initiative d’intervention en cas de crise ou de catastrophes naturelles. «Le Royaume-Uni a été parmi les premiers à adhérer à cette initiative», a souligné la ministre française. «Mon espoir est que le jour où il quittera l’UE, il restera déterminé à poursuivre cette coopération dans un cadre différent», a-t-elle ajouté.

L’Union européenne acquiert ainsi peu à peu une capacité d’intervention qui va dans le sens d’une armée européenne, même si «le projet prendra un certain temps pour se concrétiser», a-t-elle souligné. L’Allemagne doit notamment relever «le grand défi» de la reconstitution de ses forces militaires et «son budget de défense est appelé à croître de manière significative», a-t-elle noté.

Le projet devra surmonter de nombreux obstacles dont le principal est sa crédibilité. «S’entraîner à intervenir ensemble en ayant le même matériel, oui. Par contre, je ne crois pas à une armée européenne sous la même bannière, comme celle des Etats-Unis», a soutenu le chef de la Défense belge, le général Marc Compernol, dans un entretien au quotidien Le Soir. L’eurodéputé conservateur français Arnaud Danjean soulève pour sa part la question de la chaîne de commandement de cette armée européenne et demande «qui aura la légitimité d’envoyer des soldats tuer et mourir ?».

AFP
1er février 2019

Rediffusé sur le site de l'ASAF : www.asafrance.fr

Source : www.asafrance.fr