LEGION ETRANGERE : Lazare PONTICELLI et Hubert GERMAIN "les derniers"

Posté le jeudi 14 octobre 2021
LEGION ETRANGERE : Lazare PONTICELLI et Hubert GERMAIN "les derniers"

Unis par leur longévité, Lazare Ponticelli et Hubert Germain l’ont peut-être été encore plus par leur appartenance à la Légion étrangère ; voilà ce que nous démontre le colonel Jean-Jacques Noirot lui-même ancien officier de Légion.

Le dernier des Poilus avait servi à la Légion étrangère. Le dernier des compagnons de la Libération a participé à la bataille de Bir Hakeim comme officier dans les rangs de la 13e demi-brigade de Légion étrangère.

Ce sont des faits du hasard, mais aussi des symboles. Ces deux extrêmes survivances marquées du sceau de la Légion sont un hasard inattendu sur lequel personne au départ n’aurait parié un centime. D’ailleurs, quelle importance ? Il n’y a aucune gloire à être le dernier témoin d’une épopée, et ce n’est pas sur ce genre de cas fortuits que la Légion mise pour bâtir sa légende.

« L’épopée fut l’essentiel de leur existence, dans et hors des rangs de la Légion »

Lazare Ponticelli et Hubert Germain sont deux traînards ayant lambiné dans la vie sur terre alors que leurs alter ego moins gaillards ont rejoint plus précipitamment, et bien malgré eux, le royaume des ombres où règnent d’irremplaçables inconnus. Mais cette place de « dernier de quelque chose » leur assure une temporaire notoriété très exceptionnelle pour des lanternes rouges.

L’épopée fut l’essentiel de leur existence, dans et hors des rangs de la Légion. Ils s’y sont jetés de toute leur force et de toute leur âme. Ils ont répondu « présent » quand le risque fatal dépassait de loin les chances d’en tirer gloire. Le Ciel a voulu que cette gloire descende quand même sur eux. Ils ne l’ont jamais souhaitée sous cette forme. Lazare Ponticelli l’a souvent dit, en refusant d’entrer au Panthéon. Elle leur est imposée par la longévité bien sûr, mais aussi parce que les hommes en charge des destinées des peuples recherchent en tout des symboles auxquels raccrocher, comme à des bouées à la dérive, le souvenir de temps qui ne sont plus et qui contiennent des traces d’immortelles grandeurs.

Que les derniers représentants de deux communautés, aussi différentes que l’immense cohorte des Poilus de la Grande Guerre et le très confidentiel et prestigieux Ordre des Compagnons de la Libération, soient deux légionnaires est aussi un symbole. Il nous montre que la Légion a été engagée « partout où le devoir fait signe » depuis qu’elle existe, sans jamais s’écarter du chemin le plus droit, même si, parfois, l’honneur et le devoir n’ont pas fait bon ménage. Toujours, des hommes sont venus grossir ses rangs, sûrs d’être recueillis, protégés, instruits, formés. Toujours, elle a su attirer à elle des cadres de valeur prêts à tout donner pour écrire les pages glorieuses ou humbles de son histoire.

Sur ces deux survivants, l’un est un étranger devenu français, l’autre un officier français qui n’a jamais renoncé à le rester. La naturalisation de Lazare Ponticelli témoigne de l’extraordinaire puissance d’attraction qu’exerce la France sur les êtres en quête d’une vie meilleure. S’ils l’aiment et la respectent, elle leur ouvrira ses bras et fera d’eux ses fils, « non seulement par le sang reçu, mais aussi par l’amour donné ». Il n’y a pas de « Legio patria nostra » sans, au-dessus, la France qui sublime et transcende tout. Elle ne peut accepter de communautés ethniques, confessionnelles ou identitaires voulant vivre séparées, voire en opposition avec sa culture et son histoire.

Ces groupuscules violents brandissant à tout instant l’étendard d’une révolte enragée au nom de causes aussi superficielles et ostracisantes que médiocres sont aux antipodes de ce que représente le modèle d’intégration de la Légion. La France ne s’est refusée à personne, pour peu qu’on l’accepte telle qu’elle est depuis les temps qui l’ont vue grandir siècle après siècle.

C’est justement parce qu’on a voulu la défigurer qu’Hubert Germain s’est lancé dans le combat pour la restauration de son âme blessée. Les aléas de la guerre l’ont jeté dans les rangs de la Légion. En elle il a trouvé la force de se battre. En lui, la Légion a trouvé un héros digne d’elle, pour servir « un emblème des plus glorieux », celui de la France. C’est, entre autres, ce qu’il nous a dit quand il a eu l’honneur de porter la main du capitaine Danjou à Aubagne en 2012, pour le soixante-dixième anniversaire de la bataille de Bir Hakeim.

Le légionnaire et l’officier vont se trouver réunis par la loterie incertaine de la longévité. Puisse, le moment venu, c’est-à-dire le plus tard possible pour Hubert Germain, la République ne pas oublier ce qu’elle doit à ces hommes, qui furent un jour légionnaires, et le resteront toujours. Elle leur doit d’abord d’être des exemples pour la jeunesse en déshérence des quartiers de non-droit. Elle leur doit ensuite d’avoir pu survivre quand tout semblait perdu. Elle leur doit enfin d’incarner cette « certaine idée de la France » dont l’image se brouille faute d’être puissamment exaltée.


Auteur : Jean-Jacques NOIROT
Colonel (er)
Membre de l’ASAF

Source photo : Ordre de la Libération 


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