NOTION : Esprit de corps.

Posté le jeudi 03 décembre 2020
NOTION : Esprit de corps.

L’article du Figaro s’intitule : » Les policiers doivent s’extraire de l’esprit de corps qui incite à protéger les fautifs »

Dans son contenu, dont tout n’est pas à rejeter, on peut lire :

« En tout état de cause, il faudra aussi réussir à ce que les policiers abandonnent cet « esprit de corps » qui les incite à protéger les leurs, les rendant ainsi parfois otages d’une minorité de voyous sous l’uniforme qui pourrissent de l’intérieure une institution faite de femmes et d’hommes respectueux de la loi »

 

L’auteur de cet article est un professeur de criminologie. Qu’est-ce que la criminologie ? La définition qui nous en est donnée est : « Étude scientifique de la nature, des causes, du développement et du contrôle criminel à la fois d’un point de vue individuel et social ». Heureux ceux qui ont tout compris….

Cette définition nous permet cependant d’affirmer qu’un criminologue n’est pas un spécialiste de la psychologie des policiers. Et quand il convoque devant le tribunal de l’exemplarité parfaite l’ « esprit de corps », nous sommes en droit de nous demander s’il sait de quoi il parle.

 

Les militaires savent ce qu’est « l’esprit de corps ». Pour eux, c’est la foi dans le groupe qui anime chaque individu de ce groupe et lui confère, en plus de son identité, son invulnérabilité, encore appelée de nos jours résilience. Un des plus illustre exemple de cet « esprit de corps » est presqu’une légende : le cri du sergent Dubois, attribué au chevalier d’Assas : « À moi Auvergne, c’est l’ennemi » ! L’alerte est donnée, peu importe par qui. Le « corps », en l’occurrence le « Régiment d’Auvergne », est sauvé. On peut mourir ! L’histoire romancée est si belle ! Plus authentique, c’est celui des combattants de Bazeilles, de Camerone ou de Dien-Bien-Phu, unis dans des combats désespérés. Aujourd’hui comme hier, il soude tous les soldats autour du drapeau de leur régiment.

L’esprit de corps, c’est cela.

 

Et c’est cela que notre prétendu spécialiste des états d’âme de la police veut supprimer, confondant « esprit de corps » et « complicité ou compromission ». L’ « esprit de corps » existe bien dans la police nationale. Il s’exprime de nombreuses manières, pendant et en dehors du service. Il constitue un lien puissant qui unit tous les membres de cette collectivité pour lui donner force, cohérence, énergie, solidité, dans un inaltérable sentiment d’appartenance. Son référentiel est celui du devoir, de l’honneur, du dévouement. Il englobe la solidarité et la fraternité dans la prise de risque tout comme l’exemplarité dans l’action, vertus cardinales pour « servir ».

Il n’a rien à voir avec une quelconque acceptation ou protection d’actes délictueux commis par des consciences en déshérence qui se mettent en marge de ces valeurs partagées. Ceux qui se livrent à ces égarements coupables sont des comparses sans références déontologiques et qui, justement manquent d’« esprit de corps ».

 

C’est donc tout le contraire de ce que préconise notre criminologue clinicien mal inspiré qu’il faut faire dans les rangs de la police nationale. Si certaines fautes ont pu être commises - mais qui n’en commet pas, excepté chez les criminologues - c’est précisément parce que l’ « esprit de corps » n’a pas été assez puissant chez ceux qui s’en sont rendus coupables. Il faut donc avec vigueur le renforcer. Il est le seul rempart contre les déviances possibles dans ce si difficile métier exposé à la vindicte des malfrats, de la racaille, de la justice et d’une bonne partie de la presse. Il porte en lui toutes les valeurs dont doit se nourrir chaque policier. C’est à travers lui que s’élabore l’éthique de cette profession. En manquer, c’est s’exposer à faillir dans le devoir.

 

Dans la police, comme dans les armées, c’est dans l’exercice quotidien du métier, avec ses risques, ses tensions, ses épreuves, ses contacts musclés que se forge « l’esprit de corps ». Il a une valeur éducative irremplaçable. C’est aussi dans l’analyse des opérations réussies, la reconnaissance du travail accompli, la mise en valeur des actions d’éclat et la récompense des succès qu’il se renforce. Il traverse toutes les strates de la hiérarchie pour conférer son unité à cette institution nationale exemplaire.

 

« L’esprit de corps » n’a jamais eu sa place dans le détournement du devoir et le défoulement.

Une fois de plus, un supposé expert fait avaler à ses lecteurs, à travers un article qui emploie des termes comme « otages », « voyous qui pourrissent l’institution », « IGPN incestueuse », « bavure policière » un contresens complet sur ce qu’il conviendrait de faire pour améliorer l’image de la police nationale et éviter qu’à cause de certains de ses membres mal formés ou fatigués, elle soit compromise malgré elle dans des actes illicites, voire indignes. En employant de telles expressions, ce chroniqueur malveillant se fait plaisir. Il est sûr de s’attirer la sympathie des ignorants velléitaires et il remplit son office de porte-paroles des tenants d’un illusoire « vivre ensemble » qui, lui, singulièrement, manque d’ « esprit de corps ». Ce criminologue prétend renforcer la police en mettant en cause ce qu’elle a de plus précieux. En réalité, il l’affaiblit en souhaitant atrophier son âme. C’est probablement son but inavoué.

Ce n’est pas ainsi que l’on doit informer les Français. Ils méritent autre chose que de lire ces mises en accusation. Surtout, ils doivent savoir que l’ « esprit de corps » est un bien précieux pour tous ceux qui, quotidiennement, risquent leur vie au service des autres et de la nation. Il faut le préserver et sans cesse le cultiver.

Jean-Jacques NOIROT
Colonel (er)

Membre de l’ASAF
Source : www.asafrance.fr

 

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