OFFICIEL : Extraits du 9ème rapport annuel du Haut comité d’évaluation de la condition militaire

Posté le lundi 27 juillet 2015
OFFICIEL : Extraits du 9ème rapport annuel du  Haut comité d’évaluation de la condition militaire

I/ Pour les années à venir, le Haut Comité identifie dix grands risques qui, s’ils se concrétisaient, auraient un impact fort ou majeur sur la situation matérielle et morale des militaires. Une très grande attention doit être portée aux actions permettant de les prévenir ou de les maîtriser.

 

1- Cinq grands risques pourraient affecter les réformes en cours :

- un nouvel échec dans l’administration et le paiement de la solde ;
- une dégradation du service rendu au personnel, particulièrement dans le domaine de l’administration générale et du soutien commun et dans celui du soutien santé ;
- une perte d’attractivité du métier militaire et une chute des vocations ;
- une érosion de la crédibilité du commandement consécutive à la suppression de certaines de ses attributions ;
- un risque de détournement de la réforme des associations professionnelles nationales de militaires.


2- Trois grands risques portent sur le pilotage salarial :

- une rupture des équilibres généraux entre la fonction publique et la fonction militaire ;

- une rupture de la parité globale entre la police et la gendarmerie ;

- une rupture de la parité globale entre la gendarmerie et les armées.


3- Deux grands risques pourraient affecter l’identité militaire :

- une dégradation de l’image des armées dans la population ;

- une banalisation de l’état militaire que pourraient induire notamment une dérive du cadre juridique (associations professionnelles nationales de militaires, directive sur le temps de travail) ou encore l’évolution de certaines missions (la multiplication des gardes statiques), la sédentarité de certains emplois du soutien ou encore le recours probable croissant aux moyens de la « guerre à distance » (drones pilotés depuis le territoire national et non plus depuis le théâtre d’opérations, cyberdéfense, …).

 

 

II/ À l’opposé, la condition militaire peut s’appuyer sur des atouts particulièrement solides qui méritent d’être valorisés.

 

  1. Les fondamentaux de l’état militaire ont été préservés, et la discipline, le loyalisme à l’égard des institutions, la disponibilité et le sens de la mission maintenus à un niveau élevé ;

  2. La Nation témoigne d’une grande considération aux armées et à la gendarmerie en raison de leur engagement au service de la collectivité, tant en opération extérieure qu’en opération intérieure, et singulièrement depuis la mise en place de l’opération Sentinelle ;

  3. Les valeurs militaires constituent une référence pour de nombreux Français qui voient en elles un idéal qu’ils partagent. Les forces armées sont sociologiquement et culturellement en adéquation avec le pays ;

  4. La qualité des cadres est manifeste et la confiance des militaires dans leur hiérarchie de proximité reste forte ;

  5. Les liens entre les armées et la gendarmerie ont été resserrés ces dernières années, du fait de la participation accrue des gendarmes aux opérations extérieures et de leur plus grand attachement à l’état militaire ;

  6. Le moral des militaires en opérations extérieures est très élevé, parce que celles-ci donnent du sens à leur engagement et que la disponibilité des équipements ainsi qu’une plus grande plénitude du commandement y sont sources de satisfaction ;

  7. La féminisation des forces armées, globalement réussie, a contribué au succès de la professionnalisation et à l’amélioration de la condition militaire ;

  8. Le dialogue interne est actif, à travers des instances de participation, de représentation et de concertation qui ont su, dans l’ensemble, trouver leur place et répondent aux attentes des responsables militaires et de leurs subordonnés.

 

III/ Sur la base de l’analyse des risques et de l’identification des atouts auxquelles il a procédé, le Haut Comité propose sept orientations pour consolider la condition militaire sur la période 2015-2025.

 

  1. Garantir dans la durée la confiance que la Nation porte à ses soldats, en faisant mieux connaître les missions des forces armées, en veillant à ce que ces dernières demeurent à l’image de la Nation, en poursuivant le travail de mémoire et en développant les actions de sensibilisation des citoyens aux questions de défense et les relations entre les forces armées et la jeunesse ;

  2. Préserver l’état militaire, d’une part, en maintenant l’identité militaire de la gendarmerie dans le respect de la parité globale avec la police nationale, d’autre part, en veillant aux bonnes conditions de mise en œuvre des nouveaux droits accordés aux militaires, notamment le droit d’association professionnelle, ce qui suppose de les informer de façon claire et complète sur ce nouveau droit et de réagir immédiatement à toute dérive ;

  3. Garantir une politique salariale juste et équilibrée, en veillant à ce que les rémunérations des militaires, tout comme celles des fonctionnaires, ne se trouvent pas en décalage par rapport à celles des salariés du secteur privé, en assurant l’application simultanée aux militaires des mesures de portée générale affectant la rémunération des fonctionnaires civils de l’État et en engageant le plus rapidement possible la transposition à la fonction militaire des conclusions récentes des négociations dites de « parcours professionnels, carrières et rémunérations » ;

  4. Ouvrir une voie d’accès aux militaires contractuels et de carrière dans la « fonction publique en uniforme » et dans la fonction publique hospitalière. Cette nouvelle voie, qui vise à assurer le bon emploi des militaires dans l’intérêt du pays, garantirait la prise en compte des mérites individuels et pourrait concerner, pour les corps en uniforme, selon les besoins et selon les années, jusqu’au tiers des recrutements réalisés ;

  5. Revaloriser le rôle du commandement en matière de condition militaire, sur la base d’une évaluation des effets des mutualisations au regard de ses responsabilités, de la motivation des militaires et de l’efficacité globale du système. Il s’agit d’identifier les domaines pour lesquels il est nécessaire de créer de nouveaux leviers pour le commandement, dont la mise en place auprès des commandants de formation d’une enveloppe financière permettant de faire face aux imprévus et aux menues dépenses ;

  6. Élaborer un plan d’actions visant à améliorer les conditions de travail et de vie quotidienne (alimentation, hébergement, infrastructure, etc.) et la condition du personnel en opérations, en trouvant la juste mesure entre la nécessaire rusticité qui garantit l’efficacité et la réactivité et un certain « confort », que justifie avant tout la capacité à durer ;

  7. Concevoir une politique globale de la condition militaire. À cet effet, mettre en place, sous la double autorité du ministre de la défense et du ministre de l’intérieur, une mission interministérielle et interarmées permanente chargée de concevoir, de proposer et de suivre une politique globale de la condition militaire, en s’appuyant sur les analyses prospectives élaborées par des chercheurs en sociologie militaire et par les différents pôles en charge de la condition du personnel militaire au sein des ministères concernés.

 


Le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013 comme celui qui l’avait précédé en 2008 n’anticipaient pas un allégement des menaces et des crises pesant sur la paix mais au contraire, leur persistance. Le projet de loi actualisant la loi de programmation militaire, qui vient d’être déposé devant le Parlement, confirme ces anticipations.

Dans ce contexte, le Haut Comité estime que les adaptations ou améliorations à apporter à la condition militaire, certaines nécessaires, voire urgentes, en tout cas souhaitables, ne peuvent ni ne doivent conduire à un affaiblissement ou à une banalisation de l’état militaire, ou encore à une remise en cause de la cohésion de nos forces armées.

Le HCECM :


Créé par l'article 1er de la loi du 24 mars 2005 portant statut général des militaires, le Haut Comité d'évaluation de la condition militaire a pour mission, aux termes du décret n° 2005-1415 du 17 novembre 20051 précisant ses attributions, «
d'éclairer le Président de la République et le Parlement sur la situation et l'évolution de la condition militaire (…).
Dans son rapport annuel, il formule des avis et peut émettre des recommandations
».

Les neuf personnalités indépendantes qui composent actuellement le Haut Comité ont été nommées pour quatre ans par décret du Président de la République en date du 4 septembre 2014. Le Haut Comité a successivement traité dans ses huit premiers rapports de l’attractivité des carrières militaires et des rémunérations (2007), de la mobilité des militaires et de son accompagnement (2008), de la reconversion (2009), des pensions militaires de retraite (2010), de la condition des militaires en service hors métropole (2011), de la condition des militaires du rang (2012), de nouveau, des rémunérations (2012), des femmes dans les forces armées françaises (2013) et de l’administration des militaires (2014).


Depuis 2013, le rapport annuel du Haut Comité est scindé en deux parties :

un rapport thématique, objet du présent document ;

une revue annuelle de la condition militaire qui inclut le suivi des recommandations, diffusée à l’automne.

 

Téléchargez le rapport complet

 

Source : Haut Comité d'évaluation de la condition militaire