OTAN : L’Otan cherche un nouveau départ avec BIDEN

Posté le lundi 14 juin 2021
OTAN : L’Otan cherche un nouveau départ avec BIDEN

Les Européens sont réticents à faire de l’Alliance un outil face aux ambitions chinoises comme le souhaite le président américain.

L’OTAN, terriblement amochée ces dernières années, va-t-elle enfin repartir du bon pied ? C’est ce que veulent croire les alliés qui se retrouvent ce lundi à Bruxelles pour participer au premier sommet de l’Alliance depuis l’arrivée de Joe Biden à la Maison-Blanche. À la veille de ce grand rendez-vous, l’hôtel de ville de Bruxelles, situé sur la Grand-Place, devait s’illuminer pour se parer des couleurs de l’Otan. Et ce lundi le Manneken-Pis portera un costume dédié.

Le président américain, qui effectue là la deuxième étape de sa tournée en Europe avant son rendez-vous crucial avec Vladimir Poutine mercredi à Genève, a atterri dimanche soir en Belgique avec la ferme intention de réparer les relations transatlantiques. N’en déplaise aux médias et aux amateurs de sensation forte, ce sommet promet donc d’être bien plus placide que ceux des dernières années, lorsque Donald Trump était aux commandes des États-Unis et tançait les Européens. Il sera aussi plus court que les précédentes éditions puisque les échanges entre les 30 membres de l’Alliance devraient se limiter à deux heures et demie.

S’il compte sur une démonstration d’unité à Bruxelles et s’emploiera à faire passer ce message au président turc lors de leur entretien bilatéral, Joe Bien se rend aussi au siège de l’Otan avec des idées bien arrêtées de ce qu’il attend de ses partenaires. Comme son prédécesseur, il aimerait voir les alliés mobiliser davantage de moyens. Si des progrès ont été réalisés -260 milliards de dollars ont été ajoutés aux budgets depuis 2014 -, de nombreux pays n’ont pas encore rempli l’engagement de consacrer 2 % de leur PIB à leurs dépenses militaires. Bien sûr, il sera aussi question du retrait prochain des troupes américaines d’Afghanistan, dont l’annonce subite avait quelque peu déstabilisé les partenaires. Pour faire bonne figure, la Turquie, accusée d’être un pied dedans un pied dehors, devrait accepter de prendre en charge la sécurité de l’aéroport de Kaboul. « C’est un geste en faveur de l’Otan. Mais c’est sans commune mesure avec le bouleversement stratégique que représente le déploiement des missiles russes en Turquie », affirme Marc Perini de Carnegie.

Au-delà de ces questions, la Chine occupe évidemment une place de choix dans les priorités du président américain, la première de très loin. Lors du sommet de Londres de décembre 2019, Donald Trump était parvenu à arracher aux alliés quelques lignes sur la Chine dans la déclaration finale, pointant pour la première fois les « opportunités et défis » posés par Pékin. Joe Biden compte bien aller plus loin. Ce qui, au passage, lui permettrait de donner une impulsion en vue de l’élaboration du projet « Otan 2030 » sur lequel les discussions vont s’accélérer et qui doit être adopté l’an prochain, lors du sommet de Madrid. « La pression américaine est là. Et les Européens la sous-estiment totalement », regrette Alexandra de Hoop Scheffer du German Marshall Fund. Ils en ont toutefois pris la mesure au cours des derniers jours lorsqu’il a fallu finaliser le texte qui sera diffusé à l’issue de la rencontre. Dimanche après-midi, il n’était pas encore bouclé.

Les inquiétudes ne manquent pas vis-à-vis de Pékin, cette « puissance militaire sûre d’elle-même », selon les mots de Jens Stoltenberg. Le secrétaire général de l’Otan les a abondamment évoquées ces derniers jours. « La Russie et la Chine coopèrent de plus en plus ces derniers temps, sur le plan tant politique que militaire. Il s’agit d’une nouvelle dimension et d’un défi sérieux pour l’Otan », a-t-il souligné dans un entretien récent au quotidien Die Welt, en pointant « des manœuvres conjointes, des vols d’avions de guerre à longue distance et des opérations maritimes » ainsi que des échanges d’expérience « dans le domaine de l’utilisation des systèmes militaires et du contrôle sur internet ». Les alliés européens suivront-ils ? Pas sûr. « Ils n’ont aucune objection de principe à ce que la Chine devienne une superpuissance, pourvu qu’elle le fasse dans le cadre des normes internationales. En revanche, il existe un large consensus à travers le spectre politique américain sur le fait que la montée de la Chine est intrinsèquement menaçante pour les États-Unis », analyse Ian Bond, directeur de la politique étrangère au sein du think-tank, Center for European Reform.

Le problème numéro un des Européens reste la Russie, qui ne cesse de multiplier les provocations, de l’emprisonnement d’Alexeï Navalny jusqu’au déploiement de troupes à la frontière ukrainienne en passant par le soutien de Moscou au pouvoir biélorusse. Dans ce contexte de fortes tensions, les pays d’Europe orientale et centrale préfèrent bien évidemment que les moyens de l’Otan soient consacrés à la protection contre la Russie. Sans surprise, Emmanuel Macron a fait connaître son opposition, jeudi, avant de s’envoler pour le sommet du G7 dans les Cornouailles. « Pour ma part, la Chine ne fait pas partie de la géographie atlantique, ou alors ma carte a un problème. Et donc je considère que ce n’est pas le cœur du sujet », a-t-il indiqué, rappelant que « l’Otan a été construit pour faire face au Pacte de Varsovie, en tout cas elle s’est structurée idéologiquement dans ce face-à-face ». La même prudence devrait prévaloir du côté allemand alors qu’Angela Merkel participe à son dernier sommet de l’Otan et certainement aussi du côté italien.

 

Anne ROVAN
Source : Le Figaro
14 juin 2021

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