MEDIA : En réponse à l’article de Laetitia STRAUCH-BONAR ...

Posté le lundi 23 novembre 2020
MEDIA : En réponse à l’article de Laetitia STRAUCH-BONAR ...

 (« Pour en finir avec les généraux » Le Point 2514 du 29 octobre)


Dans une récente édition de l’hebdomadaire Le Point, Laetitia STRAUCH-BONART signe un éditorial qui se veut critique à l’adresse des Français se détournant par défiance des institutions et tentés de tourner leur regard, réflexe ancien, vers un chef salvateur.

Ce faisant et par le titre singulier choisi, l’éditorialiste règle le compte des « généraux ». A eux seuls elle fait implicitement endosser l’habit de César, leur imputant les pratiques de ce dernier qu’elle oppose aux principes de l’Etat de droit. Le « général » incarnerait une démocratie « césariste », éloignée de la démocratie libérale ; au-dessus des institutions, ce chef-là n’en serait pas un « serviteur » ; pour finir, elle invite à considérer avec prudence l’idée qu’un bon général ferait un bon dirigeant.

Dit autrement, c’est un syllogisme singulier qui nous est proposé. La démocratie libérale est vertueuse. La démocratie césariste, incarnée par un chef, est néfaste. Les généraux sont des chefs. Donc, les généraux sont étrangers à la démocratie libérale.

Finissons-en avec les généraux !

Le raccourci est évidemment réducteur. L’éditorialiste oppose artificiellement, de façon manichéenne,  deux situations différenciées : d’un côté des institutions qui fonctionnent, de l’autre la gouvernance autoritaire du chef, implicitement négative. Un tel postulat exclut de son analyse la juste synthèse, l’exemple même  de notre Ve République qui attend du chef élu qu’il fasse fonctionner harmonieusement les institutions dont il est le garant (article 5 de la Constitution). 

 

Dans les faits, la critique majeure de nos compatriotes n’est pas dirigée contre l’ordonnancement constitutionnel. Ils expriment en revanche une défiance croissante envers ceux qui sont chargés de le faire vivre – pour eux, les politiciens traditionnels, maires exceptés - jugés déconnectés et éloignés du peuple qu’ils administrent. La crise des « gilets jaunes » a exprimé ce sentiment. Nos concitoyens aspirent à être gouvernés par des dirigeants à l’esprit clair, alliant cohérence entre un verbe juste et une action déterminée, capable d’une sincère empathie. Avec d’autres, les chefs militaires renvoient à leurs yeux cette image.

 

Les anciens militaires de tous grades, lorsqu’ils font le choix de s’engager dans la vie publique, vivent leur mandat avec la même conviction constructive que leurs collègues élus. Les généraux d’aujourd’hui, parmi eux, ont fait leur depuis toujours la célèbre question – incluant la réponse - du général De Gaulle : « Croit-on qu'à soixante-sept ans, je vais commencer une carrière de dictateur ? »
Peut-être même cultivent-ils, avant d’autres, cette conscience de la disponibilité gratuite qu’impose leur nouvelle mission, pour avoir accepté par avance, en choisissant le métier des armes, l’idée du sacrifice jusqu’à l’ultime. 

Autant la fonction de général ne saurait accorder une précellence à postuler, autant elle ne saurait en être un motif d’ostracisme.

Général d’armée (2s) Roland GILLES
Ancien directeur général de la Gendarmerie
Ancien ambassadeur de France à Sarajevo
Maire adjoint d’Albi

Rediffusé sur le site de l'ASAF :www.asafrance.fr
Retour à la page actualité

Source : www.asafrance.fr