REACTION : A propos de l’UKRAINE

Posté le mardi 15 mars 2022
 REACTION : A propos de l’UKRAINE

On entend de partout que l’OTAN ne pourrait intervenir en Ukraine parce que cela ne ferait qu’aggraver la situation. Monsieur Clément Beaune, secrétaire d’Etat aux Affaires européennes le rappelait encore, à France inter, il y a deux ou trois jours, à propos de l’idée d’une no fly zone de l’OTAN au dessus du ciel ukrainien. Il a même dit que cela aggraverait la situation pour les Ukrainiens eux-mêmes alors que nous voulons les protéger.

Voilà  - me suis-je dit – un bel exemple de sophisme ! Pour protéger l’Ukraine  il faudrait laisser Poutine raser ses villes et tuer des gens jusque dans les hôpitaux, les maternités et les écoles. Mais comme un ministre de la France ne peut pas être un sophiste, c’est qu’il doit y avoir de vraies raisons à la passivité de l’OTAN. En voici peut-être une, qu’on entend aussi : l’OTAN est une organisation strictement défensive, au profit de ses trente membres. L’Ukraine n’en étant pas un, elle ne peut donc être défendue par l’OTAN. CQFD.

Mais alors, pourquoi l’OTAN est-elle intervenue- et de quelle manière !- au Kosovo et en Serbie, en Lybie, en Afghanistan, en Syrie ? Il doit donc y avoir une autre raison, indiscutable, qui est aussi avancée, à demi-mots: Poutine n’est pas Khadafi, ni Bachar el Assad. Il a la bombe atomique et il dit qu’il n’hésitera pas à s’en servir si l’OTAN voulait intervenir dans ses petites affaires. Même si c’est du bluff, comme je le crois, je comprends qu’on le prenne au sérieux et que l’OTAN ne veuille déclarer la guerre à la Russie si elle considère que le risque d’escalade est trop grand.

Mais quand même – je ne peux m’empêcher de me poser des questions même si tout est clair –, pourquoi l’interdiction du ciel aux avions russes devrait-elle être considérée comme une déclaration de guerre à la Russie alors que pas un avion de l’OTAN ne pénètrerait dans l’espace aérien russe et biélorusse ? Cette intervention de l’OTAN ne serait-elle pas tout simplement une assistance à un peuple en danger de mort ? L’OTAN serait-elle incapable de prendre le moindre risque alors que Poutine les prend tous, encouragé par notre passivité ?

Alors j’ai continué à réfléchir, bêtement. Et si cette passivité de l’OTAN avait pour vraie raison le refus des Etats-Unis de prendre le moindre risque dans une affaire qui ne les concerne que de très loin ? Et si l’OTAN n’était plus, pour l’Europe, qu’une assurance –bidon, l’assureur principal la considérant seulement comme le moyen de garder une tête de pont en Europe pour y vendre ses avions et autres ferrailles ? Et si les dirigeants européens avaient très bien compris cela mais se refusaient à en tirer les conséquences parce que le fantôme de l’OTAN leur donne un alibi pour ne pas se donner les moyens de leur propre défense, indépendante ? Et si l’OTAN – c'est-à-dire les Etats-Unis – ne les détournait de l’impérieux devoir de porter assistance par tous les moyens, à un voisin proche, en danger de mort, en en assumant les risques ?

Parvenu à ce point de ma réflexion, je me suis moi-même effrayé. N’est-il pas monstrueux de nourrir d’aussi vilaines pensées à l’encontre des Etats- Unis et de l’Otan ? Je dois mieux me contrôler. C’est alors que – allez savoir pourquoi -, I had a dream. Les Etats-Unis d’Europe (EUE) étaient institués ; ils s’étaient donné une défense commune, une stratégie indépendante, une solide armée, qui ne fut au début que l’OTAN sans les Etats-Unis. Ils avaient conservé une alliance classique avec ceux-ci mais en avaient conclu une autre, très vivante, avec la Russie post-Poutine, devenue une démocratie acceptable. Les EUE avaient compris que seule l’union avec la Russie pouvait assurer la sécurité du sous-continent euro-asiatique et sa juste place dans le monde, au même rang que les Etats-Unis et la Chine. C’était l’idée de De Gaulle avec l’Europe de l’Atlantique à l’Oural. C’était aussi celle de Gorbatchev, en 1991, avec sa maison commune, proposition torpillée par les Etats-Unis qui ont agité le chiffon rouge de l’Otan sous le nez de l’ours russe, jusqu’à aujourd’hui.

Je me suis alors éveillé, rempli de honte. Il faut beaucoup plus de culture politique, stratégique, militaire que je n’en puis avoir pour oser se projeter ainsi dix ou vingt ans dans l’avenir.

Michel COT

                                   Source photo : Photo d'illustration de la plateforme Pixabay

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Source : www.asafrance.fr