RELATIONS INTERNATIONALES : US GO HOME !

Posté le mardi 19 mai 2020
RELATIONS INTERNATIONALES : US GO HOME !

« Rien ne peut faire qu'une alliance demeure telle quelle, quand ont changé les conditions dans lesquelles on l'avait conclue. » Ainsi s'exprime le général de Gaulle lors d'une conférence de presse tenue le 21 février 1966. Pour le chef de l'État, il est temps de redéfinir la place de la France dans l'Otan. C'est ce qu'il précise dans une lettre datée du 7 mars à son homologue américain, Lyndon B. Johnson : « La France se propose de recouvrer sur son territoire l'entier exercice de sa souveraineté, actuellement entravé par la présence permanente d'éléments militaires alliés ou par l'utilisation qui est faite de son ciel, de cesser sa participation aux commandements intégrés et de ne plus mettre de forces à la disposition de l'Otan ».

US Go home était le slogan du parti communiste français, soutien inconditionnel de l’Union Soviétique et de la Nouvelle Internationale du Kominform crée en 1947, des partis de gauche et des pacifistes. Longtemps un panneau en incrustation « us go home » s’affichait dans l’angle de l’écran du Journal télévisé de 20 heures de l’ORTF et les mêmes inscriptions étaient taguées, notamment sur les murs des bases militaires américaines en France. Les troupes américaines ont quitté la France mais pas l’Europe. Depuis, sous la présidence de Nicolas Sarkozy, notre pays a réintégré les organes du commandement militaire intégré de l’Otan. Pour autant l’organisation est « en état de mort cérébrale » a déclaré récemment le Président Emmanuel Macron, alors même que l’Union Européenne peine pour le moins à  s'accorder sur une action extérieure commune.

A la veille des élections présidentielles aux Etats Unis on peut s’interroger sur un nouvel antiaméricanisme qui a pris pour cible son 45e président, Donald Trump. Sans doute faut-il y voir une conséquence du maelström numérique, de la médiasphère et de l’instrumentalisation de la communication. Les Français vivent souvent leur rapport au monde avec le réflexe du village gaulois, c'est-à-dire avec la certitude d'avoir raison contre le monde entier prétend Stéphane Batigne dans son livre, La France dans le Monde. Hérésie politique ou coup de génie, depuis trois années le président des USA enflamme, à coups de tweet, les réseaux sociaux et plateaux de télévision. Il suffit, désormais de citer le nom de Donald Trump, pour que des moqueries émergent et que des insolences indigentes fusent. Tenter de tenir un propos plus nuancé sur le personnage conduit immédiatement à des réprobations et aux questions d’un grand inquisiteur.
On pourra objecter que ce n’est pas nouveau. Ronald Reagan (1981-1989) avait été traité d’acteur raté d’Hollywood, quant à George Bush (2001-2009) il a été présenté parfois comme un incapable. Mais, avec Donald Trump, rien n’est interdit. C’est ainsi que mille cinq cents français ont manifesté à Paris pour protester contre la présence du président américain, invité officiel de la France, aux commémorations du 11 Novembre 2018. On pourrait penser avec Hubert Védrine sur France Culture que « C’est très bien l’universalisme (progressisme libéral), c’est bien d’avoir des idées qui dépassent le petit groupe auquel vous appartenez ; mais si l’univers tout entier ne le considère pas comme universel, c’est qu’il y a un bug dans le raisonnement ».

Cette façon de regarder les États-Unis sous le prisme du dénigrement masque un vieux ressentiment anti-américain reposant sur une méfiance à l’égard d’un pays qui demeure la première puissance du monde. Il y a le risque pour les Français soit de se résigner à leur déclin, dans une Union Européenne qui lors de cette pandémie n’a eu ni analyse ni vision commune, soit de penser que la principale nation libérale et capitaliste sur terre ne produit rien de désirable.

En comparaison il existe, semble-t-il, une grande mansuétude vis-à-vis du président communiste chinois, Xi Jinping qui conduit pourtant une agressive avancée géostratégique de la Route de la Soie. Toutefois la récente crise sanitaire du Covid- 19 aura, assurément, fait naître un doute dans les esprits sur la force des deux super puissances et la résilience du monde occidental en général. En à peine deux mois, le coronavirus a tout changé.

S’agissant des américains, déjà plus de vingt-deux millions d’entre eux ont perdu leur emploi et le taux de chômage pourrait, selon les économistes de Goldman Sachs, dépasser 15 % cet été. Le Fonds monétaire international évoque une récession de plus de 3% en 2020. Mais la véritable menace pour le monde ne vient pas des frasques des uns ou des certitudes des autres mais bien du dictat d'idéologies à visées humanistes et mondialistes. Contredire cette omnipotence, équivaut à être exclu du consensus de la société. Aussi malgré les extravagances du Président des Etats Unis il faut se garder de jugement hâtif sur une incompétence à gouverner son pays. « Nous avons entre nos mains l'avenir de notre pays. Un avenir audacieux, un avenir brillant. Nous devons rêver de grandes choses pour ce pays. Nous devons le voir réussir » avait proclamé Donald Trump lors de sa victoire électorale de 2016.

Quand on est un grand Etat ou une grande Nation, il faut pouvoir faire face aux catastrophes avec calme et sérénité. Le verdict des urnes de l’élection démocratique américaine de novembre 2020, qui opposera Donald Trump et Joe Biden, deux candidats septuagénaires, n’est pas encore acquis. 

Les Pythies de Delphes seraient bien inspirées de rendre leurs oracles en tenant compte de la devise hautement symbolique du pays…« 
In God We Trust » !

 

Colonel (er) Dominique BAUDRY
Membre de l’ASAF

 

Sources :
1.
  O. Pottier, Les Bases américaines en France, 1950-1967, L'Harmattan, 2003.
2.  M. Vaïsse, P. Mélandri et F. Bozo dir., La France et l'OTAN, 1949-1996 , Bruxelles, Complexe, 1996.
3. G. Debré Je twitte donc je suis, Fayard

 

Rediffusé sur le site de l'ASAF : www.asafrance.fr

 

 

 

Source : www.asafrance.fr