RWANDA. Pour le Rwanda, la France n’est plus complice du génocide

Posté le mardi 20 avril 2021
RWANDA. Pour le Rwanda, la France n’est plus complice du génocide

Le rapport, commandé par Kigali, conclut à « une lourde responsabilité » de Paris.

Un peu moins d’un mois après la France, le Rwanda a dévoilé lundi son propre rapport d’enquête sur le rôle de la France dans le génocide des Tustis en 1994. Le texte - quelque 600 pages d’une extrême sobriété - s’inscrit dans la même logique que celui rédigé en France. Il conclut que « l’État français porte une lourde responsabilité pour avoir rendu possible un génocide prévisible ». Rédigé par le cabinet d’avocats Muse, basé à Washington, il écarte cependant la notion de « complicité » de la France dans le génocide.

Le rapport Duclert, remis à Emmanuel Macron le 26 mars, allait dans le même sens, soulignant lui aussi « une responsabilité de la France » mais rejetant l’idée de « complicité », « si l’on entend par là une volonté de s’associer à l’entreprise génocidaire ». Les autorités françaises n’ont pas caché leur satisfaction à la lecture des conclusions du rapport Muse. « C’est une étape importante par le contenu du rapport, qui ne note pas de complicité de la France », souligne-t-on à l’Élysée, où l’on se réjouit au moins autant « de la parole politique » qui a accompagné la publication du texte. Dans une interview au Monde, le ministre des Affaires étrangères rwandais, Vincent Biruta, assure en effet « qu’il n’est pas prévu que le Rwanda entame des poursuites criminelles sur la base du rapport Muse ».

Macron se rendra au Rwanda 

Cette volonté marque une vraie rupture avec la ligne suivie par Kigali depuis 2008, et la sortie des conclusions très dures de la commission Mucyo « sur l’implication de l’État français dans la préparation et l’exécution du génocide perpétré au Rwanda en 1994 ». Cette commission avait demandé l’ouverture de poursuites contre treize responsables politiques français et une vingtaine de militaires. Cette époque semble désormais appartenir au passé.

Les juristes du cabinet Muse ne sont pas attardés sur les responsabilités individuelles. Ils se sont focalisés sur la faillite collective. Concentré sur une période plus longue que le travail français et sur des sources plus diverses - le rapport Duclert ne se fonde que sur les archives françaises et uniquement entre 1990 et 1994 -, ce document se montre tranchant « sur la volonté de dissimulation » de son rôle qui a marqué les gouvernements français des deux dernières décennies. Les deux textes s’accordent pour fustiger le rôle central de François Mitterrand dans les errements français au Rwanda. Ils divergent en revanche sur l’origine de ces manquements. Quand pour les chercheurs français, la France « est demeurée aveugle face à la préparation du génocide », les enquêteurs du cabinet américain estiment que « l’État français n’était ni aveugle ni inconscient au sujet du génocide ».

Cette divergence, certes importante, ne change pas les espoirs de l’actuel gouvernement français de faire évoluer les relations avec Kigali, tendues depuis plus de vingt-cinq ans. Après le Rwanda, qui avait bien accueilli le rapport Duclert, le président Paul Kagame recevant même son auteur, Paris voit « une avancée considérable » dans le texte de Muse. « Nous saluons une nouvelle étape pour écrire une histoire partagée et s’inscrire dans un avenir en commun », dit-on à l’Élysée. « Je pense que ce rapport va contribuer à la réconciliation entre la France et le Rwanda », affirme Vincent Biruta. Ce rapprochement, dont Emmanuel Macron a fait l’un des objectifs de sa politique africaine, pourrait connaître rapidement des étapes concrètes. Paul Kagame doit venir à Paris le 18 mai dans le cadre d’une conférence internationale sur le financement des économies africaines. Emmanuel Macron a, de son côté, répondu favorablement à une invitation à se rendre au Rwanda. La date n’a pas encore été fixée. La question d’éventuelles excuses, déjà présentées par les États-Unis, la Belgique ou l’Église catholique, mais auxquelles la France s’est toujours refusée, se posera alors comme la dernière étape pour tourner la page.

Tanguy BERTHEMET
Le Figaro
mardi 20 avril 2021

 


Remarques de l’ASAF

- Cette enquête n’est pas le fait d’historiens mais d’avocats américains!
- Les relations entre la France et le Rwanda ne sont nullement essentielles à la France.
- La France n’a évidemment aucune excuse à présenter à Kagamé. Le gouvernement de Kigali porte d’ailleurs, la responsabilité de la mort de plusieurs millions de civils en RDC, massacre effectué peu après la prise de pouvoir de Kagamé et dénoncé par l’ONU.

- Sur le fond,  l'idée maîtresse de l'accusation contre la France du rapport Muse est « d'avoir rendu possible un génocide prévisible dés 1990 ».
Certes François Mitterrand pressentait des massacres et c'est pour cela qu'il a imposé les accords d'Arusha, mais il ne pouvait  imaginer un génocide, lequel n'a été reconnu que très tardivement en mai 1994 par la France puis par les autres pays. Un génocide c'est une action planifiée et le TPIR d'Arusha a reconnu qu'il n'y avait eu aucune planification.



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