SPATIAL MILITAIRE : Pékin défie Washington

Posté le mercredi 16 septembre 2020
SPATIAL MILITAIRE : Pékin défie Washington

La navette automatique chinoise lancée le 4 septembre dernier a placé en orbite un satellite à seulement 50 km du véhicule trans-orbital américain USA 276. L'une des plateformes les plus sensibles de l'arsenal spatial américain.

Alors que la Chine vient de procéder à la mise en orbite d’une constellation de 9 satellites d’imagerie radar Gaofen 3 au moyen d’une fusée CZ-11 tirée depuis une plateforme navale, on en sait désormais d’avantage sur le mystérieux véhicule qui a été placé en orbite le 4 septembre dernier, et qui s’assimilerait à la navette automatique américaine X-37B. Une navette capable de manoeuvrer en orbite basse entre 200 et 700 km d’altitude, et d’emporter en soute des charges utiles aussi diverses que des satellites, des capteurs ISR, ou des armements.


Une démonstration capacitaire

Le vaisseau chinois ne s’est pas contenté d’orbiter pendant deux jours suivant une trajectoire proche de celle communément utilisée par le véhicule trans-orbital américain (332x348 km, inclinaison 50.2°). Quelques heures avant d’atterrir à proximité du centre d’essais nucléaires de Lop-Nor dans le désert du Taklamakan et d’être photographié par l’un des satellites de la société Planet Lab, le NORAD américain a détecté qu’un second véhicule s’était détaché du premier. Or, selon les recherches publiées il y a quelques heures par un jeune radio-amateur russe, nous savons désormais que l’objet N° 46395 ne serait pas un panneau solaire comme l’ont cru tout d’abord certains experts, mais bel et bien un satellite artificiel qui émet de manière régulière sur les fréquences 4 Mhz et 2,480 Ghz, selon une modulation jusqu’alors peu utilisée par les chinois. L’auteur de cette découverte, Dimitri Pashkov, n’est pas inconnu des spécialistes. En avril dernier, il avait démontré que le premier satellite militaire iranien , Noor, était en fait un simple Cubesat 6U de 20 sur 30 cm de côtés. Mais surtout, selon les observations du Dr Marco Langbroek, ce satellite évoluerait à seulement 50 km au dessus d’un autre véhicule orbital américain encore plus confidentiel que le X-37B, et sur lequel le Pentagone ne s’est jamais exprimé, USA 276. Il est pour l’instant trop tôt pour savoir si 46395 est dévolu à une simple mission de test, à une mission de surveillance, ou même d’ « inspection » des plateformes trans-orbitales américaines. Mais rappelons néanmoins que depuis le programme Shiyan-7, les chinois disposent désormais de l’ensemble de ces capacités.


Un projet planifié de longue date

L’intérêt que Pékin porte aux avions orbitaux n’est pas récent. La Chine avait en effet exprimé son souhait de participer au projet européen Hermès. En septembre 2006, lors du congrès spatial de Valence en Espagne, l’académie en charge des lanceurs chinois (CALT) avait présenté une road-map dont l’objectif était de développer trois générations d’avions orbitaux. La première devant officiellement être lancée en 2020. En 2010, un mois après le début de la première mission du X-37B, l’Institut 611 du groupe Chengdu et le CASC procèdent à un vol suborbital du démonstrateur Shenlong tiré depuis un bombardier H-6. Bien que plus petit avec 6 m de long, son design et ses missions sont extrêmement proches de son modèle américain. En 2013, des rumeurs circulent sur l’internet chinois selon lesquelles le CALT aurait testé le 20 septembre un nouvel appareil, l’Aotian-1, dont la mission de ravitaillement s’assimilerait elle au Dream Chaser de l’américain Sierra Nevada. Toutefois aucun élément probant n’est venu jusqu’à aujourd’hui confirmer cette information.

 

Une nouvelle menace hypersonique ?

En somme, Pékin poursuit sa stratégie de militarisation de l’espace en répondant segment par segment aux capacités américaines. Si cette plateforme suborbitale entre en service opérationnel, Pékin sera alors non seulement en mesure de procéder à des lancements discrets de micro-satellites de reconnaissance, de mener des missions ASAT, mais surtout de réaliser en orbite basse des frappes au sol au moyen d’armements hypersoniques. Des frappes qui ne laisseraient aux adversaires des chinois que quelques dizaines de secondes pour réagir.

 


Yannick GENTY – BOUDRY   
16/09/2020

Source : Air et Cosmos

 

Rediiffusé sur le site de l'ASAF : www.asafrance.fr

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