Le drapeau

 En ce 80ème anniversaire de la victoire du 8 mai 1945, nous avons pu voir, partout en France de l’Arc de Triomphe aux plus petits villages, de nombreux jeunes garçons et filles assister aux cérémonies commémoratives ou participer aux dépôts des gerbes. Beaucoup d’autres ont endossé le rôle de porte-drapeaux. Ils sont les acteurs de la relève progressive des anciens combattants, de moins en moins nombreux ou trop âgés, pour assurer le rôle de porte-drapeaux lors des cérémonies.

drapeaux

 À Paris, près de 1000 jeunes étaient rassemblés autour de 70 déportés, enfants juifs cachés et anciens combattants dont Jean Daikhowski enfin décoré de la Légion d’honneur, à 98 ans, pour s’être évadé de Drancy et avoir servi dans la Résistance comme agent de liaison à l’âge de 15 ans. Ailleurs dans les  provinces et territoires, nous avons pu les côtoyer, présents avec leurs enseignants ou accompagnant leurs parents pour chanter la Marseillaise, défiler dans les rues ou reprendre les drapeaux dans leurs mains.

Comment ne pas être émus de ces moments de transmission aux côtés de jeunes citoyens venus, à la suite et en complément de ce que leur ont appris leurs enseignants, afin de ne pas oublier ce qui s’est passé ? Communier aussi au  même attachement à la France, en ces lieux et moments de grâce, avec ces générations mêlées, un instant oublieuses de leurs mesquines querelles gauloises.

Les 8 mai sont l’une de ces journées spéciales d’apprentissage du devoir de mémoire simplement «pour dire merci aux gens qui se sont battus pour nous et nos libertés » disait une collégienne de Tours. Cette année, je gage que beaucoup de ces jeunes ont entendu pour la première fois la lecture de l’ordre du jour signé par le Général De Lattre. Ordre du jour qui commence par : « Le jour de la victoire est arrivé. » et se termine par ces mots : « Soldats vainqueurs, vos enfants apprendront la nouvelle épopée que vous doit la Patrie. »

Reconnaissons la présence de plus en plus importante au fil des ans des enfants et des jeunes gens. Ils  démontrent qu’ils ont compris qu’il leur revient de transmettre les souvenirs des anciens pour que ne s’efface pas la mémoire de tous ceux qui ont risqué leur peau pour notre liberté. Eux, ils démentent les pessimistes que l’on entend déplorer la fin du patriotisme et le délitement des fondements de la Nation.

Nous devrions remercier l’action de la « Mission Libération » pour ce début de renaissance.

La mission est présidée par l’Ambassadeur Philippe Etienne. Elle est dirigée par le GCA (2s) Michel Delion, accompagné du Préfet Pierre N’Gahane. Un conseil scientifique et d’orientation d’une douzaine de chercheurs est présidé par l’historien Denis Peschanski. Elle coordonne les ministères impliqués, les collectivités et associations régionales et de nombreux partenaires nationaux et internationaux. Elle facilite et met en valeur les initiatives locales. Elle a aussi beaucoup œuvré dans les établissements scolaires et dans les associations et clubs de jeunesse pour promouvoir, expliquer, préparer et accompagner les enseignants et les élèves autour des thématiques choisies pour le 80e anniversaire.

L’ambassadeur Etienne expliquait récemment : « nous voulons rappeler aux plus jeunes combien l’engagement de leurs aînés pour défendre nos libertés a alors prévalu et permis la reconstruction de nos démocraties ». Mme le professeur Lysiane Le Bihan Buannec, responsable pédagogique de la Mission, ajoutait : « Nous professeurs d’histoire avons avant tout un devoir d’histoire. Ce que nous devons transmettre en premier aux plus jeunes, c’est une exactitude historique. Cela leur offre des clés de compréhension de la situation internationale actuelle et permet de ne pas oublier les moments d’union passés malgré les turbulences que nous vivons ».

Quand la mission fermera ses portes, contrat rempli, il nous restera la suite : continuer à propager la volonté de défense et rappeler le prix, toujours élevé, d’une liberté toujours aussi fragile.

Cela peut se passer dans les classes et les clubs par le rappel de l’importance de la participation aux commémorations. A condition que celles-ci soient préparées, le cérémonial bien expliqué et que leur déroulement soit carré. Avec les enseignants, nos témoignages peuvent faire découvrir aux élèves qu’en participant aux commémorations ils s’inscrivent dans la mémoire des conflits, peuvent partager un passé commun, qu’eux-même soient natifs ou venus d’ailleurs. Et leur faire prendre conscience qu’ils deviennent aujourd’hui passeurs de mémoire.

 Rêvons un instant ! Que chacun d’entre nous accompagne une classe aux commémorations du 8 mai et du 11 novembre, et c’est environ l’équivalent de 20% d’une classe d’âge qui aurait pris le relais !

Cette transmission, nous pourrions la promouvoir dans les classes de défense et partout où les circonstances en offrent l’opportunité, avec les enseignants ou les encadrants engagés, pour les aider à expliquer la vérité historique, lui donner chair, en restituer le sens pour aujourd’hui.

Une tâche pas si ardue dans les classes de défense basées sur le volontariat !

Mais plus difficile, très certainement, pour cette partie de nos jeunes gens qui est perdue, faute de repères. Reste donc le parcours citoyen de l’éducation nationale, obligatoire du collège au lycée à raison d’une heure par semaine. Passons pour l’instant par dessus le très réel obstacle idéologique et imaginons un poste de « maître adjoint de civisme et de sécurité » dans chaque établissement du second degré. Un personnage recruté parmi d’anciens militaires ou des réservistes, volontaire soigneusement sélectionné et dûment formé, qui apporterait son témoignage aux élèves en complément du cours de l’enseignant, accompagnerait ces derniers pour certaines cérémonies et par la présence et l’exemple pourrait en inciter certains au respect des règles établies. Tout en contribuant par ailleurs à la sécurité de l’établissement.

Un rêve, me direz-vous ? Mais sans utopie, pas d’avenir. Et sans volonté, pas de chemin !

Léon Gautier, l’ultime survivant du Commando Kieffer, disait, peu avant de mourir : « tout cela, je l’ai fait parce qu’on m’a appris à aimer la France »

 

GCA (2S) Robert MEILLE
Vice-président de l’ASAF.

 

 

 

 

 

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