INDUSTRIE

La Serbie a confirmé la commande de 12 avions de combat Rafale auprès de Dassault Aviation

INDUSTRIELa Serbie a confirmé la commande de 12 avions de combat Rafale auprès de Dassault Aviation

La cérémonie organisée à Paris pour le centenaire de l’armistice ayant mis un terme aux combats de la Première Guerre Mondiale donna lieu à un sérieux impair diplomatique : le président serbe, Aleksandar Vučić, avait été tenu à l’écart de ses homologues, alors que son pays, allié de la France à l’époque, avait pays un lourd tribut durant cette période.

Et cela donna le sentiment, gênant, que les victoires, souvent décisives, remportés par les soldats français de l’armée d’Orient et leurs camarades serbes, comme ceux Kaijmacalan, du Dobropolje, d’Uskub, du Lac Doiran, de Prokoplé ou encore de Nic, étaient passés à la trappe.

 
Cet impair diplomatique fut aggravé par la présence de Hashim Thaçi, alors président du Kosovo, dans la tribune officielle. Depuis, l’intéressé a été inculpé par le tribunal spécial pour le Kosovo pour crimes de guerre et crime contre l’humanité sur des civile serbes et des albanais modérés…

Quoi qu’il en soit, le président Vučić n’a pas la rancune tenace. Du moins à l’égard de la France. En décembre 2021, alors qu’il venait d’annoncer une hausse des dépenses militaires conséquentes pour les années à venir, la force aérienne serbe fit savoir qu’elle avait recommandé au gouvernement d’acquérir des avions de combat Rafale afin de moderniser son aviation de combat et remplacer ses MiG-29 de facture russe.

 
« Ce genre d’achat est en grande partie une question de politique. Les avions russes nous conviendraient mieux en raison de leur technologie et de notre expérience en matière de formation et de maintenance. Mais nous pouvons rapidement former notre personnels afin d’utiliser des avions occidentaux », avait alors expliqué le général Kovacevic, un ancien responsable de la force aérienne serbe.

Depuis, cet intérêt pour le Rafale ne s’est jamais démenti. En avril dernier, encore, le président Vučić avait assuré que la Serbie était plus que jamais déterminée à se procurer au moins une douzaine d’appareils auprès de la France. Ils « amélioreront considérablement nos capacités de combat », avait-il dit, avant d’effectuer une visite officielle à Paris.

 
Visite que le président Macron vient de lui rendre, ce 29 août. Et, à cette occasion, le ministre serbe de la Défense, Bratislav Gašić, a signé un contrat pour l’acquisition de 12 Rafale [9 monoplaces et 3 biplaces], en présence d’Éric Trappier, le PDG de Dassault Aviation. Le montant de cette commande s’éleverait à environ 3 milliards d’euros.

« Au nom de Dassault Aviation et de ses partenaires, je remercie les autorités serbes de la confiance qu’elles nous accordent en choisissant le Rafale, et les assurent de notre totale mobilisation pour faire de son intégration dans les forces armées serbes un succès », a commenté M. Trappier. « Cette décision prise par la Serbie de s’équiper pour la première fois d’un avion Dassault confirme la supériorité opérationnelle du Rafale et son excellente capacité à servir les intérêts souverains d’une nation », a-t-il ajouté.

Pour autant, ce nouveau contrat, qui va porter le carnet de commandes de Dassault Aviation à 507 appareils [dont 203 à l’exportation] a donné matière à quelques interrogations, étant donné la proximité affichée de la Serbie avec la Russie, ses relations toujours compliquées non seulement avec le Kosovo mais aussi avec la Croatie, pays qui a également fait l’acquisition de 12 Rafale.

Le président Vučić s’est dit « reconnaissant » de « rejoindre le prestigieux club Rafale ». Lors d’un entretien accordé à l’AFP avant la venue de son homologue français à Belgrade, il avait rappelé que « tous nos avions intercepteurs et l’ensemble de nos avions de combat venaient de Russie » et qu’il fallait « évoluer, changer nos habitudes et tout le reste afin de préparer notre armée ».

Pour M. Macron, la signature de ce contrat « Rafale » constitue une « ouverture sur un changement stratégique malgré beaucoup de pressions, qu’il faut souligner ». Et d’insister : « C’est un vrai courage stratégique et une chance pour l’Europe ».

Cela étant, si elle est proche de la Russie, notamment pour des raisons cultuelles, la religion chrétienne-orthodoxe leur étant commune, la Serbie l’est tout autant, si ce n’est plus, de la Chine qui, aux yeux de l’Otan, fait partie des « compétiteurs systémiques » qui « cherchent à fragiliser l’ordre international fondé sur des règles ».

Ainsi, la Serbie est considérée comme le « cheval de Troie » de Pékin en Europe, en raison des nombreux investissements qu’elle y fait dans le cadre de de ses « nouvelles routes de la soie ».

« Il y a huit ans, la Serbie est devenue le premier partenaire stratégique global de la Chine dans la région de l’Europe centrale et orientale. Aujourd’hui, la Serbie est le premier pays européen à construire une communauté de destin avec la Chine, reflétant pleinement le niveau stratégique, spécial et élevé des relations entre la Chine et la Serbie », a d’ailleurs rappelé Xin Jinping, le président chinois, lors d’une visite officielle faite à Belgrade en mai dernier.

Cette proximité entre la Serbie et la Chine n’est pas seulement économique : elle est aussi militaire. Ainsi, en 2022, les forces armées serbes ont pris possession du système de défense aérienne chinois KF-3, version « export » du HQ-22, utilisé par l’Armée populaire de libération depuis 2017. Reposant sur un radar à antenne et à balayage électronique passif [PESA] et sur quante lanceurs de missiles, il est théoriquement efficace contre des cibles évoluant à une altitude maximale de 27’000 mètres et à 100 km de distance.

Reste que cela ne constitue pas véritablement un problème : la France a ainsi vendu 36 Rafale à l’Inde… qui s’est dotée du système russe de défense aérienne S-400…

LAURENT LAGNEAU

Source : opex360
29/08/2024