LIBRE OPINION : Le budget de la défense reste insuffisant face aux nouvelles menaces

Posté le dimanche 18 janvier 2015
LIBRE OPINION : Le budget de la défense reste insuffisant face aux nouvelles menaces

par le groupe de réflexion « les Arvernes3 » -  Les Echos - Adressé par Jean-Claude Tourneur.

Alors que le coût des opérations extérieures explose, le budget voté pour le ministère de la Défense en 2015 comporte de graves lacunes. A l’occasion de ses vœux aux armées et cherchant à tirer les conséquences des attentats meurtriers qui ont récemment frappé notre pays, le président de la République a annoncé le 14 janvier 2015 qu’il souhaitait revenir sur le rythme de réduction des effectifs du ministère de la défense.

Des assertions fausses

Cette annonce intervient dans un contexte d’accroissement régulier des risques et des menaces de nature géopolitique, alors que l’année 2015 se lève sous des auspices particulièrement troublés, dans un contexte de hausse régulière des difficultés structurelles du ministère français de la défense. En effet, la politique de défense du président de la République est construite sur le postulat suivant : le budget de la défense est sanctuarisé et « l’effort de la nation pour sa défense est tenu ». Ces assertions sont à ce jour totalement fausses. De fait, en 2015, le ministère de la Défense continue de s’affaiblir. En dehors des 7 500 postes supprimés, soit 65 % des 11 431 postes supprimés dans la fonction publique d’Etat, le budget voté par l’Assemblée nationale le 18 novembre 2014 pour 2015 fait état de 31,4 milliards d’euros de crédits de paiement pour la défense, dont 2,4 milliards d’euros constitués de « crédits exceptionnels », qui ne sont gagés sur rien de tangible. Ces « crédits exceptionnels » devaient entre autre être tirés de la vente de fréquences hertziennes et des retombées des exportations d’armements.

Nouvelles difficultés pour les exportations

Or, le ministère de la Défense est aujourd’hui confronté à un double problème. D’une part, les ventes de fréquences ne pourront pas se faire avant 2016 pour des raisons de négociations internationales et d’atonie du marché des télécommunications. D’autre part, les exportations françaises d’armements sont confrontées à de nouvelles difficultés qui tiennent d’abord aux irrésolutions de la politique française de défense. Ainsi, depuis le début de l’année, l’Inde a fait savoir à deux reprises qu’elle étudiait un plan B pour l’équipement de ses forces aériennes, en proposant d’acheter des avions de combat russes Sukhoi-30 plutôt que les 126 Rafale proposés par Dassault. A cela s’ajoute une dimension politique plus franco-française qui pourrait conduire à la fin des espoirs de Rafale sur ce marché. Si c’était le cas, des questions devraient être posées sur les possibles effets de la récente crise franco-russe sur ce contrat et sur l’impact plus global de l’attitude française sur nos potentiels acheteurs d’armements. De fait, on ne mesure pas suffisamment le coût politique que représente pour l’industrie française de défense la non- livraison des deux navires BPC de classe Mistral à la Russie, en décembre dernier. L’erreur politique fut effectivement de signer ce contrat avec la Russie en juin 2011, éveillant la méfiance de nos partenaires de l’Otan. Mais à cette erreur initiale s’ajoute désormais un doute certain sur la parole de la France et sur sa capacité à honorer les contrats signés ; ce que n’ont pas manqué de rappeler les Russes aux Indiens.

La Défense française n’est pas sanctuarisée

A l’heure où le budget des opérations extérieures françaises explose (450 millions prévus dans le budget 2014 pour une facture finale dépassant le milliard d’euros) et où la Cour des Comptes pointe dans son rapport du 29 septembre 2014 l’extrême faiblesse du maintien en condition opérationnelle des matériels militaires français, le ministère de la Défense propose, pour colmater les brèches budgétaires de plus en plus béantes, de vendre notre matériel militaire à des sociétés de projet ou SPV (« special purpose vehicle »), qui seront ensuite chargées de louer ces matériels à nos forces. Un constat évident s’impose : la défense française n’est pas du tout sanctuarisée. Les récents propos du président de la République montre au contraire, s’il en était encore besoin, que les sacrifices imposés au ministère de la Défense depuis 2012 ont durablement fragilisé notre sécurité et nos capacités à répondre avec succès aux défis sécuritaires, d’où qu’ils viennent.

Auteurs : groupe de réflexion « les Arvernes3 » Source: Les Echos, Adressé par Jean-Claude Tourneur.

 

Source : Les Echos