RADICALISATION : Confrontée à l’émergence de ces profils, l’armée renforce sa vigilance

Posté le mercredi 18 décembre 2019
RADICALISATION : Confrontée à l’émergence de ces profils, l’armée renforce sa vigilance

Le rapport parlementaire sur « les services publics face à la radicalisation », publié en juin, notait que « par essence, l’institution militaire est peu permissive, ne laissant ainsi que peu de place à des comportements incompatibles avec le service de la nation et les valeurs républicaines ». Mais il appelait à « ne pas baisser la garde, compte tenu de la gravité des conséquences que pourrait avoir un passage à l’acte de la part d’un individu ayant reçu une formation au métier des armes ».

En charge de ce problème, la Direction du renseignement et de la sécurité de la Défense (DRSD), précisait aux députés que « le niveau de la menace du fait de la radicalisation liée à l’islam djihadiste sunnite au sein du ministère des Armées est aujourd’hui considéré comme faible, à la fois du fait du profil mais également du volume du personnel concerné », la DRSD précisant travailler « actuellement sur quelques cas présentant des signaux faibles et ne montrant pas de dangerosité immédiate ou de velléité de départ via des filières djihadistes ».

En 2016, le général Jean-François Hogard, alors patron de la Direction de la protection et de la sécurité de la Défense (DPSD, devenue la DRSD la même année) expliquait à une mission de l’Assemblée sur « la présence et l’emploi des forces armées sur le territoire national » que sa direction suivait en priorité « une cinquantaine de dossiers de radicalisation », le général tenant à préciser que « le traitement des signalements doit être prudent, car il faut éviter de stigmatiser certaines personnes, faute de quoi on risque de les pousser dans les bras de l’ennemi »…

Reste que, face au danger, et avec une DPSD/DRSD renforcée après les attentats de 2015, le criblage, qui concerne aussi ceux qui veulent rejoindre la réserve nationale, est sévère. Un engagé potentiel est ainsi l’objet d’un « contrôle élémentaire » (avec examen du casier judiciaire, des fréquentations du candidat…) conduit par les personnels du Centre national des habilitations défense, dépendant de la DRSD. Quand on signale à la DRSD le cas d’un militaire en poste, une enquête « d’environnement » est alors menée. Elle peut être déclenchée par l’apparition de « signaux faibles » (changement de discours, de comportement, aspect physique différent, changement d’alimentation). Si le risque est avéré, les armées peuvent décider de résilier un contrat ou même de radier l’intéressé des cadres. Mais aussi de prendre d’au­tres mesures (mutation, interdiction d’opé­rations extérieures, con­fiscation des armes…).

La loi Silt, visant à renforcer la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, permet également un « rétro-criblage » des militaires déjà en poste avec la création par un décret de 2018 d’un conseil, qui ne s’est encore jamais réuni, présidé par un conseiller d’État et comprenant quatre officiers généraux des trois armées et de la gendarmerie, le directeur des ressources humaines du ministère des Armées, un officier général représentant la force armée ou de la formation rattachée dont relève le militaire en cause et un contrôleur général des armées.

En 2019, les « représentants de l’institution militaire » entendus à l’Assemblée nationale indiquaient toutefois que « les cas de suspicion de radicalisation étant souvent traités soit au moment du recrutement, soit par le biais du non-renouvellement de contrat », ce conseil « pourrait n’être jamais consulté ». Enfin, au sein de l’armée de Terre, une chaîne des officiers de protection du personnel est chargée de transmettre rapidement aux cadres des différents régiments les informations concernant des profils potentiellement radicalisés.

 

Jean Chichizola
Le Figaro
18 décembre 2019

 

Source : www.asafrance.fr