Face aux reliquats de Daech, l’opération « Chammal » s’adapte

Posté le samedi 21 septembre 2019
Face aux reliquats de Daech, l’opération « Chammal » s’adapte

L’opération française, composante de la coalition interalliée contre les djihadistes, a été lancée il y a cinq ans.

La mission n’est pas encore terminée. Au sein de l’armée française, personne ne prendrait de pari sur sa fin : même si Daech a été vaincu militairement au printemps dernier, les combattants islamistes n’ont toujours pas disparu au Levant et les forces irakiennes (FSI) ne sont pas encore en mesure de contrôler toutes les parcelles de leur territoire. À l’heure du bilan, cinq ans après son lancement, l’opération « Chammal », la composante française de la coalition internationale emmenée par les États-Unis contre la menace djihadiste, doit se poursuivre.

Les deux piliers de l’opération n’ont pas changé : offrir un appui aux forces irakiennes au sol ; former les soldats des FSI. La semaine dernière, l’aviation française a ainsi effectué 18 sorties. Les officiers français, dans le cadre de la Task Force Narvik, ont supervisé un stage de « bréchage », pour former des soldats irakiens aux techniques « d’effractions chaudes », en clair ouvrir des brèches à l’aide d’explosifs, une technique essentielle en zone urbaine. La Task Force Monsabert continue aussi de son côté sa mission de formation et de conseil de la 6e division d’infanterie irakienne.

Au total, un millier de soldats français sont toujours engagés, dont 200 pour la Marine, 350 pour la composante aérienne et les « deux bases projetées », une centaine pour l’état-major et 150 pour la formation. Les effectifs des forces spéciales ne sont pas précisés.

« L’opération s’est adaptée à la fin du califat territorial », explique le colonel Frédéric, du Centre de planification et de conduite des opérations, le « centre nerveux de la chaîne de commandement opérationnel ». « Daech est passé en mode insurrectionnel », poursuit-il lors d’un point presse au ministère des ­Armées. Les derniers combattants ­islamistes disséminés sur le territoire ont adapté leur stratégie. Ils continuent des actions de harcèlement et de menaces « à bas niveau » : constitution de caches d’armes, dissimulation d’engins explosifs, y compris sur des animaux, destruction de champs de culture… Combien les islamistes sont-ils ­encore ? « Difficile à dire », répond le colonel Frédéric.

L’objectif de « Chammal » demeure identique : « mettre Daech à portée des forces irakiennes ». Mais si les combattants irakiens impressionnent les Français par leur courage et leur fierté, il reste encore du chemin à faire. L’appareil militaire, mis à terre par la guerre en Irak, est encore en cours de reconstruction. Les FSI peinent encore dans leurs capacités de planification.

L’inconnue américaine 

Depuis la chute de Baghouz en mars dernier, la configuration de la guerre au Levant a changé. Il ne s’agit plus de reconquérir des terrains. La France a donc retiré en avril les canons d’artillerie Caesar de la Task Force Wagram qui étaient déployés près de la frontière irako-syrienne. Les missions de formation sont aussi amenées à évoluer : après avoir formé plus de 20 000 soldats irakiens, l’objectif est désormais de former de futurs formateurs pour créer un cercle vertueux.

En termes militaires, l’impact de la participation française au conflit a été malgré tout limité. Les États-Unis ont mené l’essentiel des frappes. Ils ont toujours gardé la main sur la stratégie, ne laissant aux autres qu’un rôle ­d’appui.

La configuration de l’opération « Inherent Resolve » sera amenée à évoluer dans un futur proche. Les alliés revoient chacun leur tour leur stratégie. L’Allemagne a ainsi annoncé que la Bundeswehr abandonnerait en 2020 ses missions de reconnaissance aérienne. Berlin a décidé de réduire à 700 le nombre de ses soldats engagés.

La mission reste surtout tributaire d’une situation géopolitique instable. Au sein de l’état-major français, on suit évidemment l’évolution des tensions avec l’Iran dans la région. Or l’ombre de Téhéran s’étend jusqu’en Irak. Les Forces de mobilisation populaire (PMF) qui ont contribué à la lutte contre Daech sont liées à Téhéran tout en étant intégrées au dispositif global irakien. Cette alchimie peut se révéler évidemment instable en cas d’embrasement. « On s’adaptera à la menace s’il y en a une », dit un officier.

Demeure aussi l’inconnue américaine. La stratégie imprévisible de Donald Trump complique évidemment la capacité française d’anticipation.

Nicolas BAROTTE
Le Figaro 

 

Rediffusé sur le site de l'ASAF : www.asafrance.fr

 

Source : www.asafrance.fr