CORONAVIRUS. Résilience : Les armées face à l’ennemi invisible

Posté le jeudi 26 mars 2020
CORONAVIRUS. Résilience : Les armées face à l’ennemi invisible

Point de situation sur les armées françaises dans la lutte contre le COVID-19
(Synthèse au 26 mars 2020)

 

 

 

1- Une crise d’une ampleur inédite

La crise que traverse le pays n’en est qu’à ses débuts et pourrait durer plusieurs mois. Cette pandémie va s’aggraver sans qu’il soit possible, aujourd’hui, d’imaginer toutes les conséquences. Dans ce contexte, il s’agit pour les forces armées – ultima ratio - de contribuer à la résilience de la Nation, d’offrir une réponse opérationnelle à cette crise, mais aussi d’en préparer la sortie en s’adaptant en temps réel.

Aujourd’hui, la situation sanitaire de nos forces armées encore très satisfaisante ; aucun foyer de contamination n’a été détecté, que ce soit sur le territoire ou en opérations. Les régiments, bases et bâtiments adaptent leur mode de vie avec pragmatisme et intelligence pour maintenir leur aptitude opérationnelle. Sur les théâtres d’opération, les mêmes mesures de sécurité sanitaires sont appliquées autant que de besoin.

Emanation directe de la Nation, les forces armées contribuent à part entière à la résilience de la Nation :

  • En assurant leurs missions actuelles en opérations extérieures et intérieures ;
  • En proposant un soutien adapté aux Français et au pays dans la gestion de la crise du COVID-19 (opération Résilience);
  • En anticipant la sortie de crise en préparant une remontée en puissance rapide dans les différents domaines touchés par la crise comme le recrutement, la formation ou l’entrainement.

 

2- Les forces armées françaises au contact

 

Les autorités nationales, après avoir évalué les concours qu’elles pourraient demander aux forces armées, ont déclenché le 25 mars l’opération Résilience sur le territoire national métropolitain et outre-mer.

Avant la mise en œuvre de cette opération, les trois armées (Terre Air Mer) et les services interarmées, en particulier le service de Santé, avaient d’ores et déjà répondu présents

  • en déployant un hôpital médical de campagne (du régiment médical) et une partie du 2e régiment de dragons (pour la capacité de décontamination) :
  • en mettant en œuvre un pont aérien médicalisé, avec les aéronefs de transport sanitarisés (Morphée) :
  • en réalisant une évacuation sanitaire par voie maritime (PHA* Tonnerre) entre la Corse et la métropole.

Dans le même temps, l’armée de Terre avait mis en alerte des unités prêtes à être engagées, sur ordre, dans le cadre d’une opération d’ampleur, tant en métropole qu’outre-mer, sur un large spectre de missions avec le soutien des autres armées en fonction du besoin en acheminements opérationnels, ce qui est aujourd’hui le cas avec l’opération Résilience.

Bien entendu, ces missions comporteront inévitablement des prises de risques face à l'ennemi invisible et tout sera mis en œuvre pour que les soldats de nos armées soient engagés dans les meilleures conditions de sécurité.

 

3- La conservation d’un niveau opérationnel seuil.

 

Tout en lançant l’opération Résilience et parce que la crise ne s’arrêtera pas à la fin de l’épidémie et que des périls autres que sanitaires peuvent surgir, il est impératif de préserver un niveau opérationnel seuil.

Pour ce faire les mesures mises en œuvre sont déclinées en fonction des spécificités de chaque armée.

Les armées appliquent actuellement le plan de continuation de l’activité à son 2e stade dont le but est de garantir la continuité du commandement, veiller à une stricte application des consignes et mesures barrières, et adapter le taux de présence en unité aux besoins opérationnels.

  • Relance d'une activité adaptée dans toutes les unités, en termes d’entrainement comme de formation. C’est une activité mesurée et nécessaire car le pays ne peut pas se permettre de sortir de cette crise avec une armée amoindrie. A cet effet, les chefs de contact, avec l’appui de leurs supérieurs et conseillés par leurs médecins ont la charge d’assurer une reprise ou continuation maîtrisée de l’instruction, de la formation et de l’entraînement en équilibrant avec finesse les mesures internes de compartimentage et les mesures de confinement strictes vis-à-vis de l’extérieur.
  • Maintien des activités nécessaires à la préservation de l’avenir, éventuellement en mode dégradé.

à  Vie dans les bases et quartiers : toutes les mesures nécessaires sont prises pour éviter toute promiscuité d’hébergement, isoler systématiquement les cas symptomatiques détectés, désinfecter les locaux chaque fois que nécessaire, adapter les modalités de restauration aux prescriptions des mesures barrières et enfin supprimer les activités de cohésion, de rayonnement et autres rassemblements ou séances d’ordre serré.
à  Instruction. Au cas par cas, les mesures sont prises pour envisager de diminuer le nombre de stagiaires, limiter impérativement les contacts physiques, mettre en place de mesures de protection plus approfondies que les simples mesures barrières (désinfection des postes de travail, etc.),
à  Préparation opérationnelle. Les activités afférentes se font en garnison, dans les bases ou à bord et sur les emprises militaires. Elles sont limitées à la préparation des projections, à la formation initiale et aux formations indispensables pour assurer les missions prioritaires stratégiques fixées par le ministère des armées (MINARM).

 

4- L’opération Résilience 

Cette opération ne remet pas en cause l’opération Sentinelle de lutte anti-terroriste qui perdure donc sur l’ensemble du territoire. L’opération se déclinera au plan national relayée sur le territoire par les préfets de région et départementaux.

La règle des 4 I :

Elle s’appuie sur l’instruction interministérielle relative à l’engagement des Armées sur le territoire national lorsqu’elles interviennent sur réquisition de l’autorité civile (N° 10100/SGDSN/PSE/PSN/NP du 14/11/2017). Elle précise que, dans le milieu terrestre, les forces de sécurité intérieure et de sécurité civile assument la primauté de l’action pour garantir la sécurité et la protection des populations. Dès lors que les moyens dont dispose l’autorité civile sont estimés inexistants, insuffisants, inadaptés ou indisponibles, les armées peuvent être sollicitées pour renforcer le dispositif de sécurité mis en œuvre sous la responsabilité du ministre de l’intérieur.

L’opération Résilience ne remet pas en cause les opérations extérieures actuellement engagées, à l’exception de l’opération d’assistance opérationnelle aux forces armées irakiennes du fait de la mise en confinement de ce pays. Les soldats français engagés en Irak sont donc rapatriées à compter du 26 mars.

L’opération Résilience engage les forces armées au soutien de la Nation (population et services publics) dans les trois domaines suivants :

  • Soutien sanitaire
  • Soutien logistique
  • Et protection.

NB : le domaine protection exclut toute opération de maintien de l’ordre.

 

Soutien sanitaire

Outre la mise en œuvre d’un élément militaire de réanimation (ensemble modulaire constitué à la demande pour les besoins spécifiques de réanimation - NDLR ASAF), le service de santé des Armées et les forces armées peuvent appuyer les autorités médicales par du personnel de santé, par la mise à disposition des services des huit hôpitaux d’instruction des armées.

En coopération avec la Marine nationale et l’armée de l’Air, le service santé des Armées participe aux évacuations sanitaires par voie aérienne (Morphée) et maritime.

Dans ce cadre, la Marine nationale a éployé le PHA Tonnerre en Méditerranée et les BPC Mistral et Dixmude vont appareillés respectivement pour soutenir nos populations des DOM TOM en Océan Indien et dans les Caraïbes.

 

Soutien logistique

Essentiellement, pris en charge de missions de transport (personnel, fret cargo, fret spécialisé et exceptionnels).
Capacité à déployer des centres d’évacuation de personnels.

Soutien protection

  • Protection de sites d’intérêt vital (entrepôts pharmaceutiques par exemple) ou protection de sites publics pour soulager les FSI (forces de sécurité intérieure)
  • Escorte de convois de matériels sanitaires ou autres (ravitaillement, énergie, etc..).
  • Surveillance de zones ou de sites particuliers.

 

Les forces armées françaises, pleinement investie dans leur mission régalienne de la défense de la Nation, mettent tout en œuvre pour appuyer les Français et le pays dans la lutte contre le CODIV19 tout en activant un plan d’action robuste et global pour conserver une capacité opérationnelle réelle en sortie de crise.

 

Colonel (er) Pascal DUHAR
Adhérent ASAF Haute-Garonne

 

 

*Porte hélicoptères amphibie :

Outil de commandement et de projection de forces, les PHA peuvent, depuis leur pont d’envol, déployer une force aéromobile complète constituée d’hélicoptères de combat et de transport, destinée à conduire des frappes ou des opérations de surveillance d’un territoire. Leur capacité am­phibie leur permet, grâce aux engins de débarquement rapides et chalands de transport de matériel, de projeter des troupes et véhicules de la mer vers la terre, mais aussi de mener des opérations de secours aux populations (évacuation de ressortissants, assistance après un sinistre).

Leur modularité permet d’embarquer un état-major et de mettre en œuvre un poste de commandement de forces interarmées pour la conduite d’une opération nationale ou multinationale depuis la mer. Les PHA disposent d’un véritable hôpital médico-chirurgical embarqué (HMCE) permettant de faire face à une crise sanitaire de grande envergure (blocs opératoires, salle de traitement des grands brûlés…).

Long de 199 mètres pour un déplacement de 21 500 tonnes en charge, ce navire peut, en effet, accueillir jusqu'à 450 hommes de troupe ou passagers, 16 hélicoptères, 70 véhicules et 4 chalands de transbordement maritime (CTM).

Hôpital médico-chirurgical embarqué (HMCE) : le plateau technique des installations hospitalières (900 m2) est comparable à celui d’une ville de 25 000 habitants. Cet hôpital est par conséquent dimensionné pour conduire des missions sanitaires de grande envergure :
- soutien santé d’une opération amphibie ; soutien santé d’une force navale à la mer et soutien santé d’une opération humanitaire ou évacuation de ressortissants.

Les moyens chirurgicaux mis en place autorisent jusqu’à trente interventions par jour. En cas d’opérations sanitaires, il est possible d’installer des Eléments Techniques Modulaires (ETM), dans le hangar hélicoptères afin d’augmenter les capacités d’accueil de l’hôpital.

Le HMCEC possède des capacités de télémédecine permettant de transférer au bord les informations relatives aux blessés au sein de la force afin de faciliter leur prise en charge à leur arrivée sur le bâtiment. Ce système peut être aussi utilisé en téléassistance chirurgicale. Par son biais, un chirurgien senior de la spécialité non détenue par le chirurgien opérant apporte une aide opératoire en direct. Enfin, la télémédecine sert aussi au transfert pour interprétation d’images radiologiques (scanner). Le HMCE en chiffres :

  • 900 m² de superficie ;
  • 21 lits médicalisés + 48 lits médicalisables ; 1 salle de télémédecine ; 1 salle de tri et de déchocage; • 2 blocs opératoires ; 1 salle de soins pour grands brûlés ; 1 cabinet dentaire ; 1 salle de radiologie avec capacité scanner ; 1 laboratoire de biologie et 1 local de traitement des déchets d’activité de soins à risque infectieux.
  • 1 morgue et 1 buanderie médicale.

 

Rediffusé sur le site de l'ASAF : www.asafrance.fr

Source : www.asafrance.fr