ARMEMENT : Les sénateurs veulent rendre le projet « Scaf » irréversible

Posté le jeudi 16 juillet 2020
ARMEMENT : Les sénateurs veulent rendre le projet « Scaf » irréversible

2040, c’est loin et proche. C’est pourquoi il faut accélérer. 

Mercredi, les sénateurs Hélène Conway-Mouret (PS) et Ronan Le Gleut (LR) ont rendu leur rapport sur le programme franco-allemand d’avion du futur, le Scaf, qui doit remplacer le Rafale (1) dans une vingtaine d’années. Leur conclusion est une mise en garde : il faut rendre le projet « irréversible », recommandent-ils.

Né d’une volonté politique entre Paris et Berlin; à laquelle s’est joint Madrid, le Scaf est soumis aux aléas politiques outre-Rhin, où le projet n’est pas toujours perçu comme vital. Pour éviter des blocages qui mettent en danger sa pérennité, les deux élus proposent de « signer en 2021 un contrat-cadre global pour poursuivre le développement du démonstrateur du Scaf jusqu’en 2025/2026 plutôt qu’une succession de contrats exigeant une validation politique réitérée ». Chaque contrat doit en effet être validé par un vote du Bundestag. Le premier de 65 millions d’euros a concerné l’étude du concept, le deuxième, pour 155 millions d’euros, a concerné la première phase du développement du démonstrateur. Le coût global du Scaf à terme oscille entre 50 et 80 milliards d’euros.

Ces derniers mois, la France a été échaudée par les hésitations allemandes. Paris a d’abord dû négocier un compromis sur les modalités d’exportation de projets d’armement communs. Puis le gouvernement français a subi la pression du Bundestag. Pour faire avancer le projet de char du futur, (MGCS), dans lequel est impliquée l’industrie allemande, les députés de la coalition CDU/CSU SPD ont retardé le vote de crédits nécessaires au Scaf. Dans l’entourage de la ministre allemande de la défense, on pointe du doigt la responsabilité du SPD, en difficulté politique. Mais la perspective d’un changement de coalition à Berlin à l’automne 2021, avec l’entrée potentielle des Verts au gouvernement, ne laisse pas présager des discussions plus simples. « Les Verts allemands sont proeuropéens et adhèrent au projet par engagement européen », veut croire Ronan Le Gleut.

Mais il met quoi qu’il en soit en garde contre le « tunnel politique » qui s’étendra jusqu’au printemps 2022 avec la présidentielle en France et qui risque de retarder toute décision. Il suggère de faire passer au projet Scaf le cap du milliard d’euros engagés pour rendre tout abandon impossible.

Pour progresser, les deux gouvernements et les industriels devront s’entendre sur des questions clés, comme par exemple la « furtivité » demandée à l’appareil, ou la place de l’intelligence artificielle. Car le Scaf n’est pas seulement un avion de nouvelle génération mais une nouvelle façon de combattre dans le ciel. Les experts parlent de « système de système » où l’avion est entouré de drones, de leurres, l’ensemble connecté à un « cloud de combat ».

Le programme sera structurant pour les armées et pour le concept de défense européenne. Mais il est concurrencé par un projet similaire, le Tempest, mené par la Grande-Bretagne. Londres et ses partenaires veulent être prêts pour 2035. Le rapport des sénateurs propose d’achever le Scaf au même moment.


Nicolas BAROTTE
Le Figaro
jeudi 16 juillet 2020

(1) Le groupe Dassault, qui construit le Rafale, est propriétaire du « Figaro ».

 

Rediffusé sur le site de l'ASAF : www.asafrance.fr
Source photo :Ministère des Armées

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